
— Yan Doublet - Université Laval
C'est le temps des vacances, période idéale pour feuilleter un bon livre. Voici quelques propositions d'œuvres écrites par des membres de la communauté universitaire.
34B (L'instant même), par Isabelle Hubert

Saviez-vous que le magnifique bâtiment de l'Université Laval connu aujourd'hui sous le nom d'édifice La Fabrique était autrefois une manufacture de lingerie féminine? C'est dans ce décor chargé d'histoire qu'Isabelle Hubert, dramaturge et chargée de cours en écriture dramatique, situe l'action de sa pièce 34B, transposée dans un ouvrage captivant qui se lit comme un roman.
Inspirée de faits réels, cette œuvre nous plonge dans le quotidien des ouvrières, ces «femmes dont le nom ne figure pas sur les plaques honorifiques», mais qui ont pourtant façonné le succès de la Dominion Corset, de 1897 à 1977. À travers des dialogues savoureux et vibrants d'authenticité, Isabelle Hubert aborde des thèmes comme l'émancipation des femmes, les inégalités sociales, la place de la religion, l'obscurantisme, le patriarcat et le capitalisme. Le récit alterne entre passé et présent avec divers personnages, dont une étudiante en arts visuels à l'édifice La Fabrique qui démontre l'importance de poursuivre la lutte féministe.
Pour écrire cette pièce résolument engagée, Isabelle Hubert a effectué de longues recherches dans les archives. Plusieurs anecdotes parfois troublantes sur la vie difficile à l'usine sont tirées d'un livre du professeur en histoire Mathieu Du Berger, Les ouvrières de Dominion Corset à Québec, paru aux Presses de l'Université Laval.
Figure bien connue du milieu théâtral, Isabelle Hubert enseigne, dirige une compagnie de création et a signé de nombreux textes pour la scène, dont Le mythe d'Orphée, Les Plouffe et Rose, finaliste aux Prix littéraires du Gouverneur général.
— Extrait du livre
Le code Labeaume. Confidences d'un maire de Québec (Éditions de l'Homme), par Karine Gagnon

Avec son franc parler et sa personnalité colorée, Régis Labeaume s'est imposé comme une figure politique et médiatique incontournable. Dans Le code Labeaume, la journaliste bien connue Karine Gagnon – aussi étudiante à la maîtrise en science politique - retrace le parcours du 37e maire de Québec, en poste de 2007 à 2021.
Au-delà d'une simple biographie, cet ouvrage plonge au cœur des moments forts – et parfois tumultueux – de la ville durant son mandat. Des fêtes du 400e anniversaire de Québec au tragique attentat de la Grande Mosquée, en passant par l'affaire Clotaire Rapaille, le Centre Vidéotron et le projet de tramway, Karine Gagnon lève le voile sur les coulisses de la scène municipale. Elle donne la parole à des proches et figures publiques qui l'ont côtoyé. Le tout est enrichi de caricatures signées Ygreck et de photos d'événements qui l'ont marqué, dont les remises d'un doctorat honoris causa à Céline Dion, à Jean Béliveau et à Guy Laliberté.
À travers ces témoignages et anecdotes, Karine Gagnon brosse le portrait d'un Régis Labeaume plus intime et nuancé – loin de la figure publique, on découvre un homme sensible et capable d'autodérision. Le livre dévoile aussi certains pans méconnus de sa vie, comme son enfance pauvre en banlieue de Québec, son incursion en politique provinciale à l'époque de ses études en sociologie à l'Université Laval ou encore son ascension dans l'industrie minière.
— Extrait
Dieu n'est pas là aujourd'hui (Éditions Hannenorak), traduit par Sylvie Nicolas

On la connaît comme poétesse, romancière, nouvelliste, autrice de littérature jeunesse, éditrice, enseignante et docteure en création littéraire, mais Sylvie Nicolas est aussi une traductrice prolifique. Sa plus récente œuvre: un recueil de nouvelles de Francine Cunningham, une écrivaine membre de la nation crie de Saddle Lake, en Alberta.
Dès les premières pages de Dieu n'est pas là aujourd'hui, le ton est donné avec cette histoire d'un homme qui se rend au bureau de Dieu, avec qui il espérait pouvoir discuter de ses problèmes. Le Créateur étant absent, il rencontre plutôt une vieille femme qui lui fera une révélation troublante.
Campées dans des décors inusités et avec des personnages colorés, les nouvelles à la fois étranges et amusantes de Francine Cunningham ont pour la plupart une fin inattendue ou surprenante. Le fil conducteur: elles explorent la nature humaine dans toute sa complexité. Le tout avec une plume sensible dont Sylvie Nicolas a su conserver tout le style et le rythme.
— Extrait
En explosion devant nos yeux (XYZ), par Dominique La Salle

Scénariste en vogue, Antoine écrit des sketchs humoristiques pour une émission de télévision sur l'actualité, mais aurait voulu faire du cinéma. Lorsque sa conjointe décède d'un accident de vélo, il touche le fond du baril. Après s'être réveillé dans un parc avec un œil au beurre noir et aucun souvenir de ce qui s'est passé la veille, il se lance dans un projet audacieux: créer une œuvre de «cinéma vivant» à partir d'images captées par des cellulaires et des caméras de surveillance. Le sujet? Les personnes en situation d'itinérance qui occupent illégalement le parc.
En croisant cette histoire et les notes du Bureau du coroner, chargé d'enquêter sur un événement qui se révèlera au fil des pages, Dominique La Salle propose un roman à la fois original et haletant. Au thème du deuil s'ajoute ceux, très actuels, de l'itinérance, de la crise du logement et de la gentrification.
Enseignant la philosophie et diplômé en création littéraire, Dominique La Salle signe ici son troisième roman, confirmant sa place parmi les voix littéraires à surveiller.
— Extrait
Les filles de Guillemette (Méga Éditions), par Catherine Ferland

Avec sa série Les filles de Guillemette, Catherine Ferland réinvente la manière de raconter l'histoire aux jeunes. L'historienne choisit de mettre l'accent sur les figures féminines de la Nouvelle-France, à travers leurs yeux d'enfant. Deux romans illustrés sont disponibles pour l'instant: Guillemette et Marie.
Dans le premier tome, lauréat du Prix de création littéraire de la Ville de Québec, on suit la fille de Louis Hébert et Marie Rollet, âgée de 11 ans en 1617. Samuel de Champlain ayant convaincu ses parents de s'établir à Québec, elle quitte la France à bord du navire Saint-Étienne. Tempête, icebergs, baleines, premier contact avec les Montagnais: ce périple sera rempli de surprises.
Le second tome, Marie, se déroule en 1644, à une époque où la colonie de Québec est désormais bien établie. En jouant à cache-cache dans la forêt, Marie Hébert — l'une des 7 enfants de Guillemette et Guillaume Couillard — fera une découverte surprenante. Le récit intègre avec finesse plusieurs figures marquantes de l'époque, tels que les Augustines, Charles Huault de Montmagny, Abraham Martin ou encore Robert Giffard.
Détentrice d'un doctorat en histoire, Catherine Ferland excelle à faire revivre le passé à travers les yeux d'une enfant. Elle réussit à faire ressentir ce que vivent ses personnages, avec leurs peurs, leurs découvertes et leur regard curieux sur le monde. Les illustrations de Karina Dupuis viennent appuyer les récits. S'ajoutent à cela plusieurs informations historiques en notes de bas de page et à la fin des romans.
— Extrait
Arracher les frontières (Hamac), collectif dirigé par Mattia Scarpulla

Auteur d'origine italienne ayant vécu en France avant d'émigrer au Québec, Mattia Scarpulla a souvent écrit sur les thèmes de l'identité et de l'immigration. Pour ce recueil, il a proposé à 11 poétesses et poètes issus de différents pays d'écrire sur «l'étranger en eux», en plus de signer un texte lui-même.
Ces autrices et auteurs, connus pour la plupart durant ses études en création littéraire, sont des migrants de première ou deuxième génération. C'est le cas, entre autres, de Laetitia Beaumel et Anne Peyrouse, Françaises d'origine, et de Sebastián Ibarra Gutiérrez, qui a quitté le Chili pour faire un doctorat à l'Université Laval.
Leurs textes, qui naviguent entre bonheur et nostalgie, colère et émerveillement, démontrent à quel point les réalités sont multifacettes lorsqu'il est question de changer de territoire. Tantôt touchants, tantôt incisifs, ils résonnent avec l'actualité, les enjeux de l'immigration et du vivre-ensemble étant plus que jamais pertinents.
Arracher les frontières est le troisième ouvrage collectif dirigé par Mattia Scarpulla après Épiderme et Hors de soi.
— Extrait (Sebastián Ibarra Gutiérrez)
Charlotte et la fin de l'esclavage au Québec (Septentrion), par Webster et ValMo

Comment raconter l'esclavage aux enfants? C'est le défi que relève Aly Ndiaye, alias Webster, artiste de la scène hip-hop et diplômé en histoire de l'Université Laval. Après avoir publié un album illustré sur la vie d'Olivier Le Jeune, premier esclave au Canada, il se tourne maintenant vers Charlotte Trim, qui a contribué à la disparition de l'esclavage au Québec.
Née en Guinée, Charlotte arrive au Canada comme esclave dans les années 1780. En tentant de recouvrer sa liberté, elle deviendra un symbole d'émancipation, après une décision historique du juge James Monk.
Des côtes de l'Afrique à la vallée du Saint-Laurent, en passant par les îles caribéennes, Webster a colligé toutes les informations disponibles afin de retracer le parcours de cette femme courageuse. Accompagné des superbes illustrations de ValMo, le texte est écrit au je, comme si c'était la principale intéressée qui racontait sa propre histoire. L'ouvrage se conclut sur des informations sur le contexte historique, un glossaire et des suggestions de lecture pour pousser plus loin ses connaissances. Un bon ouvrage, bref, pour familiariser les enfants avec un chapitre douloureux de l'histoire du Québec.
— Extrait
Louise Beaudoin. Entretiens (Boréal), par Stéphane Paquin et Mathieu Roy

Figure emblématique de la politique québécoise, Louise Beaudoin revient sur son parcours dans cette série d'entretiens menés sur 3 ans avec Stéphane Paquin, titulaire de la Chaire Jarislowsky sur la confiance et le leadership politique, et Mathieu Roy, de l'Université du Québec à Montréal.
De ses années d'études en histoire à l'Université Laval – «un lieu formidable de découvertes» – à ses rôles de déléguée générale du Québec à Paris, de ministre des Relations internationales, de la Culture et des Communications et de responsable de l'application de la Charte de la langue française, elle partage les coulisses d'une carrière marquée par la passion et le service public.
Au fil des échanges, on découvre les influences formatrices qui ont nourri sa pensée (notamment les professeurs Jean Hamelin, Fernand Dumont et Vincent Lemieux), mais aussi les défis, les luttes et les convictions profondes qui l'ont guidée.
Ce livre brosse le portrait d'une femme d'État dont les réflexions sur le Québec, la langue et la culture résonnent encore aujourd'hui.
— Extrait
L'Expérience de mort imminente. Science et spiritualité (éditions Odile Jacob), par Steven Laureys

Sujet aussi fascinant qu'énigmatique, l'expérience de mort imminente n'a pas fini de livrer ses secrets. Dans cet ouvrage, Steven Laureys, médecin clinicien enseignant à la Faculté de médecine et titulaire de la Chaire d'excellence en recherche du Canada en neuroplasticité, explore ce phénomène souvent relégué au domaine du paranormal.
S'appuyant sur les dernières avancées en neurosciences et sur de nombreux témoignages, l'auteur cherche à comprendre les mécanismes cérébraux à l'origine des sensations vécues par des personnes ayant frôlé la mort. Il adopte une posture résolument humble: loin de revendiquer une vérité absolue, il reconnaît les limites de la science et la complexité du phénomène, soulignant combien le vécu subjectif, les croyances personnelles et les émotions jouent un rôle central dans ces expériences.
Son intérêt pour le sujet ne date pas d'hier, sa propre mère ayant vécu une expérience de mort imminente lors de complications survenues à sa naissance. Pour approfondir sa compréhension du phénomène, le Dr Laureys n'a pas hésité à expérimenter lui-même des états modifiés de conscience proches de ceux décrits par les patients, l’expérience de mort imminente ne survenant pas uniquement en contexte de danger; elle peut aussi apparaître lors d’un évanouissement, d’un état de méditation profonde ou à la suite d’un choc émotionnel intense.
Écrit dans un style accessible, ce livre mêle habilement contenu scientifique, récit personnel et réflexions philosophiques. À lire pour qui s'intéresse au fonctionnement du cerveau et aux mécanismes de la conscience.
— Extrait
Le testament de Tante Mimi (Éditions de l'Apothéose), par Aida Baram

Elle est Égyptienne. Il est Syrien. Le testament de Tante Mimi raconte l'histoire d'amour entre deux professeurs issus de cultures et de religions différentes qui se rencontrent à Montréal.
À travers cette relation, Aida Bairam dresse le portrait d'immigrants en quête d'ancrage dans une société nouvelle. Elle explore les enjeux de l'intégration, tout en célébrant la richesse de la diversité et la force des liens familiaux. Le récit est accompagné d'une foule d'informations sur la géographie, les arts et l'histoire du Proche-Orient.
Elle-même née en Syrie, Aida Bairam est chercheuse au Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec-Université Laval et professeure retraitée du Département de pédiatrie. Le testament de Tante Mimi est son troisième ouvrage après Elle et Elles, où elle relate son histoire marquée par la guerre, et Carnet d'Aida, qui réunit de courtes histoires et des réflexions en prose.
Les bénéfices des ventes du roman sont versés au Fonds Aida Bairam pour le développement universitaire. Ce fonds, géré par la Direction de la philanthropie et des relations avec les diplômées et diplômés, permet de soutenir des personnes étudiantes d'origine arabe, prioritairement syriennes.
— Extrait