
Avec Jean-Paul Riopelle, Marcel Barbeau est l'un des rares peintres au Canada à s'être engagé dans les premières expériences d'expressionisme abstrait gestuel.
— Daniel Roussel
«Nous leur avons demandé de raconter leur vie, explique Alexandre Motulsky-Falardeau. Malgré les difficultés et les embûches, qu'est-ce qui les poussait à persévérer dans cette voie pas toujours facile? Pour certains, moins habitués à prendre la parole, il n'était pas toujours facile de parler de choses profondes ou intimes. Mais la confiance s'est assez vite installée.»
Comment devient-on artiste? La designer Madeleine Arbour a commencé comme étalagiste chez Birks sur la rue Sainte-Catherine à Montréal, à l'âge de 16 ans. Comme ses vitrines s'apparentaient davantage à des oeuvres d'art qu'à une banale devanture de magasin, elle est un jour remarquée par un ami du peintre et sculpteur Paul-Émile Borduas, puis invitée à se joindre au groupe composé des Jean-Paul Riopelle, Pierre Gauvreau et autres artistes révolutionnaires. C'est le début d'une longue et fructueuse carrière. Pour le dessinateur, sculpteur et photographe Paul Lacroix, professeur à l'École des arts visuels durant des années et décédé en avril 2014, ce sont des voyages annuels en France et en Italie effectués dans la jeune vingtaine qui ont allumé sa flamme artistique. Le sculpteur Michel Goulet raconte, pour sa part, que c'est en fouillant dans la garde-robe de sa grand-mère qu'il est tombé sur des dessins tellement «renversants» que sa grand-mère, auteure des dessins, l'a vite inscrit au cours d'arts du samedi offert dans son patelin. Françoise Sullivan, elle, se destinait plutôt à la danse. Attirée par la peinture et la sculpture, l'artiste a décidé très tôt de prendre la vie à bras le corps et d'intégrer tous ces arts qu'elle aimait, sans rien laisser tomber de ses passions, dont la danse. «J'ai toujours voulu exprimer une seule et unique chose, avec des moyens différents. L'important était d'être capable d'y intégrer une part d'intuition», indique la belle octogénaire.
Et si c'était à refaire, choisiraient-ils de nouveau la voie artistique? La question ne se pose même pas. À 90 ans bien sonnés, le grand Marcel Barbeau confie ainsi que peindre est pour lui aussi vital que de respirer, à tel point qu'il dit ne pas se sentir bien physiquement et mentalement s'il ne produit rien pendant une semaine. «Ma vie, c'est mon art», résume-t-il.
Tous ceux et celles qui se questionnent sur l'art devraient prendre plaisir à lire ce recueil de témoignages prenants, dont la préface est signée par l'historien de l'art John Porter. «Il faut lire le petit livre de Bois et Motulsky-Falardeau, écrit John Porter. Il a quelque chose de grand et d'inspirant.»