Martine Frenette, coordonnatrice d'activités à la Faculté de médecine, en est à son deuxième retour aux études à l'Université Laval en tant qu'employée. La cérémonie de collation des grades du 17 juin en après-midi marque la récompense de ses efforts depuis 2016 pour obtenir son baccalauréat en philosophie.
Elle a choisi cette discipline après avoir vu sa fille s'y épanouir à la maîtrise. «Elle avait tellement une belle ouverture. J'ai voulu moi aussi découvrir ces grands penseurs.» Ce fut tout un défi pour Martine Frenette. Elle souligne que le baccalauréat en philosophie l'a sortie de sa zone de confort. «J'ai dû travailler fort, mais quand je commence quelque chose, je le finis. Arrêter ne fait pas partie de mes options.»
Elle a dû concilier son travail à temps plein et ses études, en choisissant des cours de soir ou de fin de semaine. Autrement, elle reprenait ses heures. «Lorsque j'avais un cours le matin, je reprenais du temps de travail sur l'heure du diner et la fin de semaine», précise la coordonnatrice.
Elle a commencé en suivant deux cours par session, puis un seul. «Deux, c'est devenu trop avec les cours de 2e et 3e année. Je passais mon samedi sur un cours et le dimanche sur l'autre, en plus de recommencer à travailler le lundi. Je devais aussi m'occuper de ma maison. Mes moments de pause étaient pour passer la balayeuse», raconte-t-elle en riant. Au total, elle aura mis sept ans pour terminer son baccalauréat.
C'était motivant pour elle de côtoyer les autres étudiants. «Même si j'étais souvent plus âgée que les professeurs, ils étaient ouverts et englobants. Je me suis sentie bien accueillie, souligne la sexagénaire. Quand on avait des discussions, certains étudiants comprenaient des aspects impressionnants des textes à l'étude. J'ai beaucoup appris à leur contact.»
La pandémie a rendu son parcours plus difficile. Dès qu'elle a pu assister au cours en présence, elle l'a fait. «J'aime le contact, j'aime être assise dans une classe avec l'ambiance. C'est plus facile d'être concentré que devant son écran.»
La philosophie dans sa vie personnelle et professionnelle
Toutes les connaissances accumulées durant son baccalauréat, elle les garde précieusement et les met en pratique dans sa vie. Actuellement, c'est le dernier philosophe qu'elle a étudié, Michel de Montaigne, vers lequel elle se tourne beaucoup. «Montaigne dit qu'on est toujours à l'extérieur de soi, dans des projets, et cela nous divertit et capte notre attention. Il nous ramène à nous-mêmes, nous suggère de nous observer pour nous connaître. Et c'est ce que j'essaie de faire», rapporte Martine Frenette, qui sent que son baccalauréat l'a changée.
Plusieurs autres auteurs l'ont marquée, dont Léon Tolstoï à travers ses descriptions de la condition humaine et du sens de la vie. «Ses personnages s'autodécouvrent et se transforment devant les épreuves. Il décrit ainsi le potentiel de chaque personne d’évoluer. Ses textes sont édifiants, ils m'ont fait beaucoup réfléchir», raconte celle qui a même emprunté des livres à sa fille après son cours. Deux personnages l'ont particulièrement marquée: Ivan Ilitch, qui fait une introspection avant sa mort, et Pierre Bézoukhov, dans Guerre et paix, qui subit une transformation dramatique.
Le baccalauréat en philosophie lui a aussi permis d'améliorer ses capacités rédactionnelles. «On lit tellement dans les cours, alors ça enrichit le vocabulaire et ça permet de développer de meilleures structures de phrases», souligne-t-elle.
Un milieu de travail propice aux études
Martine Frenette rapporte la facilité dont jouit le personnel de l'Université Laval dans la poursuite de leurs études. Durant son premier baccalauréat en communication, elle a pu être libérée durant deux sessions pour terminer sa formation. «Je venais d'arriver à la Faculté de médecine et ils m'ont dit qu'ils préféraient que je prenne tout de suite mon congé pour revenir en tant que professionnelle», raconte-t-elle.
Elle avait commencé un Certificat en communications en 1988, mais ce n'est qu'en 2006 qu'elle est entrée au baccalauréat. «À la sortie de la collation des grades de ma fille, qui venait de finir sa maîtrise en philosophie, a dit: “La prochaine fois qu'on vient ici, c'est pour maman”».
Après plusieurs formations, Martine a encore soif d'apprendre. Durant son dernier baccalauréat, elle a terminé trois cours du Certificat sur les œuvres marquantes de la culture occidentale et songe s'y inscrire officiellement.
Vivre à nouveau la collation des grades
L'an dernier, Martine Frenette a replongé dans l'ambiance des cérémonies de la collation des grades comme représentante de la Faculté de médecine. «Ça m'a fait du bien d'entendre la musique, de vivre l'émotion.»
Cette année, elle y participe comme finissante. Lors de sa première collation des grades pour le baccalauréat en communication, en 2009, ses parents étaient présents. «Cette année, ce sera différent parce qu'ils sont décédés, mais je vais avoir des amies et ma fille à mes côtés», dit-t-elle, reconnaissante du soutien de sa famille durant la poursuite de ses études.