Dans un article publié aujourd'hui par la revue Nature, des chercheurs de l'Université McGill et de l'Université Laval annoncent avoir mis au point une méthode qui pourrait avoir des répercussions très importantes sur le suivi des personnes qui sont opérées pour un cancer du poumon. Cette méthode permet de prédire avec une exactitude d'environ 95% si le cancer réapparaîtra chez une personne qui a subi la résection d'une tumeur pulmonaire.
Les équipes des professeurs Logan Walsh et Daniela Quail, de l'Université McGill, et Philippe Joubert, de l'Université Laval, arrivent à ce constat après avoir analysé des tumeurs provenant de 416 patients ayant subi une résection pulmonaire. Les échantillons étudiés proviennent de la biobanque du Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec-Université Laval (IUCPQ-UL) qui contient plus de 5000 spécimens de tumeurs du poumon. Une cohorte de 60 patients du Centre universitaire de santé universitaire McGill a été utilisée pour valider les résultats.
À l'aide d'un système d'imagerie sophistiqué – l'imagerie par cytométrie de masse – qui permet de distinguer individuellement les cellules, les chercheurs ont caractérisé les différents types de cellules présentes dans le micro-environnement de chaque tumeur ainsi que leur localisation. Ils ont ensuite fait appel à l'intelligence artificielle pour associer les éléments observables sur ces images et le risque de récidive du cancer.
«Grâce à l'apprentissage neuronal et aux analyses des professeurs Walsh et Quail, nous avons identifié 35 marqueurs qui influencent le risque de récidive du cancer. La valeur prédictive de notre outil est d'environ 95%. Cela signifie qu'à partir d'un échantillon d'à peine 1 mm2 de tumeur, nous pouvons prédire avec certitude le risque de récidive chez un patient. Présentement, en milieu clinique, nous ne disposons d'aucun outil prédictif aussi performant», affirme le pathologiste Philippe Joubert, professeur à la Faculté de médecine de l'Université Laval et chercheur à l'IUCPQ-UL et au Centre de recherche sur le cancer de l'Université Laval.
Environ 40% des personnes opérées pour un cancer du poumon devront faire face à une récidive de leur maladie. «L'approche développée dans cette étude permettrait de les identifier dans les jours qui suivent la chirurgie. Nous pourrions donc leur proposer des traitements adjuvants adaptés à leur cas ou des examens de suivi à intervalles plus courts, de façon à pouvoir intervenir rapidement s'il y a récidive», souligne le professeur Joubert.
Présentement, 30% des cas de cancers pulmonaires sont détectés assez tôt pour que la tumeur puisse être enlevée par résection, poursuit-il. «L'instauration de programmes de dépistage du cancer du poumon qui est envisagée pour des groupes à risque comme les fumeurs pourrait faire grimper ce taux à 70%. Les cas de tumeurs résécables sont ceux pour lesquels les chances de guérison sont les plus élevées. La méthode que nous avons développée devra être adaptée pour permettre son utilisation en milieu clinique, mais elle pourrait révolutionner la prise en charge de la majorité des patients chez qui un cancer du poumon sera détecté.»