Un concept de climat motivationnel qui agit comme facteur de protection contre la violence interpersonnelle dans les équipes sportives. Tel est le sujet de la conférence en ligne que prononcera la psychologue du sport Jeaninne Ohlert, du Département de santé et psychologie sociale de l’Université sportive allemande de Cologne, le 16 février, dans le cadre des activités de la Chaire de recherche Sécurité et intégrité en milieu sportif de l’Université Laval.
«Ce climat motivationnel est mis en place par l’entraîneur, explique Sylvie Parent, professeure au Département d’éducation physique et titulaire de la chaire créée en novembre 2020. Il donne une place à l’athlète, il le laisse s’exprimer. Nous ne sommes plus dans l’approche autoritaire. Ce qu’on constate dans les études récentes est que le climat motivationnel serait un facteur de protection contre la violence interpersonnelle en milieu sportif.»
Jeannine Ohlert figure parmi les 8 chercheurs internationaux membres de la Chaire. Celle-ci comprend également 10 chercheurs canadiens et québécois. À cette équipe s’ajoutent 20 étudiants aux cycles supérieurs, dont certains proviennent des groupes de recherche des membres européens. Les chercheurs sont issus de nombreuses disciplines telles que la criminologie, la psychologie, le travail social, l’éducation physique et sportive, la sociologie, la médecine, la nutrition et la sexologie. «La violence en contexte sportif est un problème complexe qui nécessite une approche multidisciplinaire, souligne la professeure Parent. Ce regroupement unique au monde de chercheurs, auquel se joignent des partenaires du milieu, possède des expertises méthodologiques diverses qui permettront d’apporter un éclairage nouveau au phénomène et des pistes de solutions originales. On peut dire que nous sommes à l’avant-garde dans notre domaine.»
Selon elle, la violence en contexte sportif est une question qui préoccupe de plus en plus les décideurs politiques et les organisations sportives. «Ici comme ailleurs, indique Sylvie Parent, nous assistons à un éveil collectif quant aux enjeux entourant la sécurité et l’intégrité des participantes et participants en milieu sportif, ainsi qu’à un réel désir de créer un environnement de pratique exempt de violence. On reconnaît de plus en plus l’existence de cette problématique et les athlètes en parlent beaucoup plus. Or, il existe encore peu de données sur la prévalence du phénomène, sur les facteurs de risque qui y sont associés et sur l’efficacité des interventions mises en place pour contrer le problème.»
Un aperçu de la problématique
Une publication récente de l’Institut national de santé publique du Québec fait état de statistiques accablantes liées à la violence en contexte sportif. Cette publication se reporte notamment à une étude menée au Québec auprès de 1055 jeunes athlètes âgés de 14 à 17 ans. Cette recherche a révélé que 79,2% de ceux-ci auraient fait l’expérience d’au moins une forme de violence psychologique au cours de leur carrière sportive. De plus, 39,9% auraient été victimes d’au moins une forme de violence physique, 35,7% auraient subi de la négligence en sport et 28,2% de la violence sexuelle.
Selon la même étude, la problématique comprendrait trois volets: la violence de la part d’un adulte en position d’autorité, la violence entre coéquipiers ou adversaires, et la violence de la part des spectateurs.
D’autres études révèlent que la violence commise par une personne en position d’autorité peut être physique (par exemple, frapper, secouer, pousser), psychologique (comme ridiculiser, humilier), sexuelle (harceler ou abuser sexuellement) et inclure la négligence (entre autres, savoir qu’un athlète souffre d’une blessure ou d’une condition médicale qui nécessite un traitement et ne rien faire).
Les conséquences, selon d’autres recherches, comprennent la diminution du bien-être et de la qualité de vie, les problèmes de santé mentale comme la dépression, les symptômes de stress post-traumatique et les problèmes alimentaires, les comportements suicidaires ainsi que les blessures physiques.
Dix projets de recherche
Les travaux de la Chaire s’articulent autour de quatre grands axes:
La surveillance
L’élaboration, l’implantation et l’évaluation
La mobilisation et le transfert de connaissances
L’impact de la COVID-19 sur les jeunes sportifs
Dix projets de recherche sont en cours de réalisation. L’étude sur l’impact de la participation sportive des adolescents en est un. Cette recherche permettra de documenter les facteurs de risque et de protection chez 2000 adolescents garçons et filles, de même que les conséquences de la violence envers les athlètes. Un autre sujet de recherche est la santé mentale des étudiantes et étudiants athlètes universitaires en contexte de pandémie mondiale.
La professeure Parent insiste sur le projet axé sur le vécu des athlètes du Québec. «Ce projet, dit-elle, a pour objectif d’étudier la violence envers des athlètes québécois âgés de 14 à 30 ans qui prennent part à un sport organisé. Nous souhaitons faire un portrait représentatif à tous les 5 ans au moyen d’une étude populationnelle. Notre outil de mesure sera le Violence Towards Athletes Questionnaire conçu par notre équipe à l’Université Laval et en usage dans plusieurs pays.»
Un autre projet sur lequel insiste Sylvie Parent est l’analyse des besoins de formation des entraîneuses et entraîneurs québécois au sujet de la maltraitance des athlètes. Dans une démarche de partenariat avec le ministère de l’Éducation du Québec, les chercheurs auront la responsabilité d’établir les profils des entraîneuses et entraîneurs québécois quant aux facteurs associés à l’usage de la maltraitance envers les athlètes, d’évaluer leur disposition au changement face à cette problématique et de décrire leurs besoins en matière de formation.
Colloque, site Web
Le premier colloque de la Chaire s’est tenu en ligne le 5 novembre 2021 sur le thème «Sécurité et intégrité: pour un sport et une société engagée». Il a attiré 191 internautes de par le monde.
En décembre, la Chaire lançait son nouveau site Web. Il présente l’ensemble des réalisations de la Chaire, dont des articles scientifiques, des entrevues accordées aux médias et des infographies scientifiques, entre autres. Les infographies les plus récentes sont consacrées à l’utilisation de l’exercice comme punition, au contrôle du poids comme manifestation de la maltraitance envers les athlètes et aux expériences des jeunes arbitres du Québec.
Consulter le site de la Chaire de recherche Sécurité et intégrité en milieu sportif de l’Université Laval