Invitée à casser la glace, Norma Bélanger, professeure au Département de médecine familiale, a déclaré ne pas douter que les médecins soient dignes de notre confiance. «La confiance naît d’une perception de compétence, dit-elle. Les médecins que nous formons ont l’expertise clinique et nous leur enseignons l’importance de communiquer avec les patients.» Ce que confirme Marianne Boulanger, résidente de deuxième année en médecine. «On nous apprend à bâtir une relation de confiance avec les patients. Par contre, il peut y avoir des médecins qui communiquent moins bien et le contexte du système de santé peut faire en sorte que les médecins ont moins de temps pour écouter leurs patients», reconnaît-elle.
Rénald Bergeron, qui occupe le poste d’adjoint au doyen de la Faculté de médecine après avoir dirigé pendant huit ans le Département de médecine familiale, abonde dans le même sens. «Les médecins méritent notre confiance, mais le contexte actuel place beaucoup de pressions sur eux. Dans les urgences et les cliniques sans rendez-vous, ça peut devenir du travail à la chaîne et des manques de communication peuvent survenir à l’occasion. Les gens doivent apprendre à mieux utiliser les ressources du système de santé et ils doivent aussi exercer leur esprit critique face à la profession médicale.»
Pour Michel O’Neill de la Faculté des sciences infirmières, les médecins méritent notre confiance, mais pas pour les raisons mentionnées par les autres participants. «Il faut leur faire confiance, d’une part, parce que la confiance contribue au processus de guérison, et d’autre part, parce que la confiance est indispensable à une bonne communication.» Selon le sociologue, une bonne partie des problèmes patient-médecin vient du fait que nous remettons entre les mains de la médecine des problèmes qui ne lui appartiennent pas, notamment tout ce qui concerne le mal-être. «Plus de la moitié des problèmes qu’on amène dans le cabinet du médecin devraient être réglés ailleurs, estime-t-il. Les gens veulent que les médecins les réparent comme les garagistes réparent leur auto.»
Les espoirs que la population place dans la médecine ne sont pas toujours réalistes, croit aussi Rénald Bergeron. «Les gens veulent demeurer en santé, mais sans changer leurs habitudes de vie. Je ne peux pourtant pas faire du vélo ou mieux manger à la place de mes patients.» Par ailleurs, le professeur constate qu’un autre problème de fond teinte les attentes de la population envers la médecine. «Grâce aux progrès de la science, les gens vivent de plus en plus vieux, souvent en composant avec plusieurs maladies pendant de nombreuses années. Pendant tout ce temps, ils évacuent l’idée, pourtant incontournable, qu’un jour ou l’autre leur existence devra prendre fin.»