La saison chaude est à nos portes. Normalement, des hordes de touristes débarqueraient sur les quais du Vieux-Port pour déambuler dans les rues de Québec. Mais, comme on le sait, la normalité ne fait pas partie du quotidien depuis qu'un certain virus a frappé la planète.
Cet été encore, l'industrie touristique de Québec devra oublier la saison des croisières, les navires ne pouvant circuler dans les eaux canadiennes avant février 2022. Et si on profitait de cette pause pour trouver des façons de relancer l'industrie de façon plus durable? C'est l'idée derrière le projet de recherche de Charles Zinser.
«Le Québec a l'occasion de se développer de façon plus verte dans son industrie des croisières. Si nous nous comparons à certaines villes portuaires dans le monde, nous ne sommes pas dans les pires destinations, mais il y a moyen de devenir un leader», affirme l'étudiant à la maîtrise en sciences géographiques.
Charles Zinser a reçu une bourse du Réseau Québec Maritime pour outiller les acteurs de l'industrie de la région de Québec qui aspirent à un modèle d'affaires facilitant la relance et la durabilité du tourisme de croisière postpandémie. En plus d'étudier les conséquences négatives des croisières sur la faune et la flore maritime du Saint-Laurent, Charles Zinser s'intéresse aux mesures mises en place ailleurs dans le monde pour favoriser un retour durable de cette industrie. Ce projet est encadré par Laurent Bourdeau, professeur au Département de géographie et titulaire de la Chaire de recherche en partenariat sur l'attractivité et l'innovation en tourisme.
Avant la pandémie, les croisières représentaient une industrie de plus ou moins 500 millions de dollars à Québec. «En 2019, rappelle l'étudiant, la ville a accueilli environ 230 000 croisiéristes. L'objectif du Port de Québec était d'attirer 400 000 croisiéristes en 2025. L'augmentation du nombre de croisières peut avoir des impacts néfastes sur des zones protégées ou sensibles du Saint-Laurent, comme le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, réputé pour ses baleines. La COVID-19 nous amène à nous demander si on conserve ce modèle d'affaires basé sur le volume pour développer l'industrie ou si on devrait réfléchir à des façons d'atténuer les impacts sociaux et environnementaux des croisières à long terme.»
Parmi les solutions inspirantes, l'étudiant cite un programme créé à Amsterdam, City in balance 2018-2022, qui vise un meilleur équilibre entre la qualité de vie des résidents et l'accueil des touristes. «En ce qui concerne les croisières, on retrouve plusieurs ambitions et objectifs, comme la mise en place d'un plan d'action pour réduire le bruit, une optimisation du système d'autocars pour l'embarquement et le débarquement des croisiéristes et la promotion de croisières durables.»
Charles Zinser donne aussi en exemple le cas de Venise, où l'on a instauré une «taxe de débarquement» pour mieux contrôler le flux des touristes qui submergent la cité des Doges. Les autorités prévoient aussi interdire les bateaux de plus de 1000 tonnes dans les canaux de la ville.
Selon l'étudiant, il ne fait aucun doute que l'industrie reprendra dès qu'il sera possible de retourner en mer. Quand? Et comment? Voilà des questions hautement plus complexes. «Personne ne sait de quoi aura l'air l'industrie l'année prochaine ou dans les années à venir. D'un côté, les compagnies de croisière font des efforts pour relancer l'industrie. De l'autre, les gouvernements doivent maintenir des mesures pour contrer la pandémie. Toute prévision dans ce contexte est hypothétique.»
Chose certaine, l'étudiant sent un intérêt grandissant pour un nouveau modèle de tourisme. En juin, il participait à un webinaire, Croisières et villes portuaires, prêtes à un retour?, organisé par le réseau mondial des villes portuaires AIVP. «Plusieurs gestionnaires portuaires, notamment du Port de Québec et d'autres ports en Europe, ont assisté à cet événement virtuel et étaient invités à répondre à des sondages. À la question “Selon vous, quelle devrait être la priorité dans les mois à venir pour les croisières dans les villes portuaires?”, 73% des participants ont répondu: “Repenser le secteur pour un modèle de tourisme plus durable”. Il s'agissait d'un sondage, donc rien de scientifique, mais un certain désir de relance durable était observable.»
De quoi donner un peu d'espoir à tous ceux qui s'inquiètent de conséquences négatives dans l'industrie du tourisme.