26 mars 2025
La Rencontre Université-Défense dans un contexte géopolitique de plus en plus instable
L'événement qui a eu lieu à l'Université Laval a notamment porté sur le renforcement de la présence militaire canadienne en Arctique et dans l'Indopacifique

Cette année, ce rendez-vous en défense et en sécurité internationale a mis l'accent sur le domaine naval et le rôle clé des Forces armées canadiennes dans les zones sensibles.
— Branden O'Brien et Andy Stultz
Le 20 mars dernier, la 16ᵉ Rencontre Université-Défense (UNIDEF) a réuni quelque 150 expertes, experts et militaires à l'Université Laval pour discuter d'un enjeu stratégique crucial: l'évolution des conflits et la nécessité d'adopter une approche pandomaine. Dans un contexte géopolitique de plus en plus instable, le Canada cherche à renforcer sa présence militaire en Arctique et dans l'Indopacifique, des régions où se jouent des rapports de force déterminants pour l'avenir, ont soulevé les panélistes.
Une présence militaire accrue dans des zones stratégiques
Les opérations pandomaines, qui intègrent tous les domaines opérationnels (mer, terre, air, cyberespace et information), permettent une réponse plus efficace aux menaces modernes. Cette année, l'UNIDEF a mis l'accent sur le domaine naval et le rôle clé des Forces armées canadiennes (FAC) dans ces zones sensibles.
«Les tensions géopolitiques nous obligent à être sur plusieurs fronts, et notre visibilité est essentielle pour affirmer notre engagement auprès de nos alliés», a expliqué le major Pierre-Luc Gauthier, du Centre de guerre interarmées du Canada. Alors que les relations avec les États-Unis évoluent, le Canada doit démontrer sa capacité à agir de manière autonome tout en renforçant ses partenariats stratégiques, ont conclu les panélistes.
En Arctique, la fonte des glaces ouvre de nouvelles routes maritimes, suscitant l'intérêt d'autres nations. Face à ces enjeux, Ottawa accroît sa présence grâce à la Garde côtière et à la Marine royale canadienne. L'objectif: protéger la souveraineté nationale et sécuriser les nouvelles voies commerciales, a exposé Marc-André Meunier, commissaire adjoint à la Garde côtière canadienne.
Dans l'Indopacifique, le Canada déploie ses forces vers de nouveaux alliés et participe à des exercices conjoints avec ses partenaires de l'OTAN. La montée en puissance de la Chine et son expansion maritime bouleversent les équilibres régionaux, obligeant le Canada à adapter sa stratégie, a rappelé Martin Poëti, professeur au Collège militaire royal de Saint-Jean.

De gauche à droite: Marc-André Meunier, commissaire adjoint, région du centre, à la Garde côtière canadienne, la colonelle Catherine Marchetti, Léa Bossert, étudiante à la maîtrise en études internationales à l'École supérieure d'études internationales, le lieutenant-colonel David Serapins et le major Pierre-Luc Gauthier.
— Alice Bonardi-Igout
Des défis technologiques et organisationnels
L'intégration des nouvelles technologies est au cœur des opérations pandomaines, ont insisté les panélistes. Intelligence artificielle, cybersécurité et collecte de données transforment les stratégies militaires. Mais cette évolution pose aussi des défis en matière de coordination interarmées et de formation.
«Les FAC sont un outil du gouvernement pour affirmer sa position sur la scène internationale, a souligné le major Gauthier. Elles n'agissent pas seules, mais elles servent de levier pour renforcer la posture stratégique du pays.»
Toutefois, le virage technologique ne doit pas se faire au détriment des compétences opérationnelles traditionnelles. L'adoption de nouveaux outils exige une formation rigoureuse et une adaptation constante des méthodes de travail, a expliqué le lieutenant-colonel David Serapins.
Si l'approche pandomaine est encore en développement, elle représente une avancée majeure dans la manière dont le Canada envisage sa défense. «Ce n'est pas seulement une question de zones géographiques, c'est une nouvelle manière de penser les opérations militaires», a pour sa part souligné le brigadier-général à la retraite Richard Giguère, expert en résidence à l'École supérieure d'études internationales (ESEI).
Bien que les FAC aient commencé à développer des concepts stratégiques en ce sens, leur mise en application sur le terrain reste un défi à suivre de près, selon lui.

Richard Giguère, brigadier-général à la retraite, expert en résidence à l'École supérieure d'études internationales
— Alice Bonardi-Igout
Un événement formateur pour la relève
Organisée conjointement par l'ESEI et l'Institut militaire de Québec, en partenariat avec le Centre sur la sécurité internationale et le Réseau canadien sur la défense et la sécurité, l'UNIDEF est un rendez-vous pour les expertes et experts en défense et en sécurité internationale.
Plus de 250 personnes, dont des militaires, des scientifiques et des membres de la communauté étudiante et professorale de l'Université Laval, ont assisté à cette rencontre annuelle. Cette année encore, plusieurs étudiantes et étudiants ont pu enrichir leurs connaissances et échanger avec des spécialistes du domaine, renforçant ainsi la mission de l'Université Laval en tant que lieu de réflexion et de formation sur les grands enjeux stratégiques internationaux.