Au cours des dernières décennies, les études portant sur l'effet des œufs sur la santé cardiovasculaire sont arrivées à tout et à son contraire. Si vous ne savez plus ce qu'il faut en penser, un article scientifique qui paraît aujourd’hui dans le British Medical Journal pourrait vous aider à y voir plus clair. «Nos analyses démontrent que l'on peut manger jusqu'à un œuf par jour sans que le risque cardiovasculaire en souffre», résume le premier auteur de l'étude, Jean-Philippe Drouin-Chartier, de l'Université Laval.
Le chercheur, rattaché à la Faculté de pharmacie et à l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels, et ses collaborateurs de l'Université Harvard ont d'abord analysé les résultats de trois études américaines qui ont suivi pendant trois décennies près de 216 000 personnes afin de déterminer l’effet des habitudes de vie et de l'alimentation sur leur santé. De plus, ils ont réalisé une méta-analyse de 28 études menées dans différents pays qui ont aussi exploré ces mêmes variables chez un total de 1,7 million de personnes.
Les analyses indiquent que le risque de maladie cardiovasculaire – infarctus, maladie coronarienne ou accident vasculaire cérébral – n'est pas plus élevé chez les gens qui consomment un œuf ou plus par jour que chez ceux qui consomment moins d’un œuf par mois. L’âge, le sexe, l’indice de masse corporelle, le niveau d’activité physique, le tabagisme, l’hypertension, l’hypercholestérolémie, l’utilisation de statines et la qualité générale de l’alimentation ne changent rien à ce constat.
La controverse entourant l'effet des œufs sur les maladies cardiovasculaires refait régulièrement surface, constate le professeur Drouin-Chartier. «Son origine remonte aux premières études qui ont établi un lien entre le cholestérol sanguin et le risque cardiovasculaire. Comme l’œuf est l'aliment le plus riche en cholestérol, on en a déduit qu’il devait augmenter le cholestérol sanguin et, donc, le risque cardiovasculaire. Ce que l’on ignorait à l’époque est que le foie autorégule le taux de cholestérol sanguin. Lorsqu’on mange plus de cholestérol, notre foie en produit moins. C’est pour cette raison que la corrélation entre la consommation de cholestérol et le taux de cholestérol sanguin est très faible.»
L’étude publiée dans le British Medical Journal apporte des preuves solides de l'absence d'association négative entre une consommation modérée d’œufs et le risque cardiovasculaire, mais le débat n’est pas clos pour autant, reconnaît le chercheur. «Des études rapportant des effets néfastes des œufs ont été publiées au cours de la dernière année et une autre étude qui arrive à la même conclusion paraîtra prochainement, signale-t-il. Mais, au moment où je vous parle, les conclusions auxquelles nous sommes arrivés sont les plus fiables parce qu'elles reposent sur l'ensemble des études réalisées jusqu’à maintenant sur le sujet.»