
La composition de l'oeuvre repose sur un jeu de réflexions et d'images savamment étudiées.
— Marc Robitaille
«Quand l'appel de projets a été lancé, en novembre dernier, nous avons sauté sur l'occasion», raconte Audrey Morency, membre du collectif d'étudiants de l'École d'architecture Les Malcommodes. Leur création baptisée Imposteur a été choisie pour occuper la Batterie royale. «Ce site étant imposé, notre élan a été d'effectuer des recherches historiques, poursuit l'étudiante à la maîtrise en architecture. Nous avons appris que le lieu d'origine, construit à la fin du 17e siècle, a longtemps été enfoui. Puis en 1977, il a été déterré et reconstitué.»
Ces informations ont amené Les Malcommodes à s'interroger: Cette version actualisée de la Batterie royale rencontre-t-elle celle d'origine? Est-elle trop scénarisée avec ses canons ajoutés? Quelle est la valeur réelle qu'on lui accorde considérant qu'elle a longtemps été enfouie? «Nous voulons soulever ces questions avec notre installation», poursuit Mme Morency. Imposteur offre l'illusion d'un passage qui débouche à travers la douve, mais abouti sur une impasse. Le résultat est à s'y méprendre, promet l'étudiante. En plus, la structure niche dans un panorama spectaculaire, avec en arrière-plan le fleuve Saint-Laurent ou le Château Frontenac.
Sa réalisation a exigé des Malcommodes qu'ils coordonnent plusieurs ressources pour se procurer du matériel, obtenir les conseils d'un ingénieur ou dénicher un entrepreneur pour ériger l'installation. Cela dit, ce n'est pas à son propre crédit que le groupe veut frapper l'imaginaire: «Notre intention est de mieux faire apprécier le métier d'architecte dont les réflexions sur l'aménagement des espaces habités sont essentielles.»
Karine Ledoyen sera aussi des Passages insolites. L'étudiante à la maîtrise en arts de la scène et de l'écran et sa compagnie Danse K par K ont été invités à proposer une chorégraphie qui fera écho à l'installation de Carole Baillargeon intitulée 10 sur l'échelle de Beaufort (une échelle de mesure des vents de 0 à 12). Réalisée dans le cadre des Rendez-vous 2017, l'oeuvre intégrera l'événement au Quai Renaud le 19 juillet. Elle se décline autour de 12 grands mats et d'une coque de bateau faite d'aluminium et de cordages où évolueront les danseurs.
«Pour ce mandat, j'ai puisé dans mon répertoire avec un extrait de ma pièce Trois paysages créée en 2013 en complicité avec les danseurs Fabien Piché et Ariane Voineau, explique Karine Ledoyen. J'avais travaillé autour du thème de l'air, celui qu'on respire tous ou qui nous chavire.» La mer et la navigation y trouvent aussi leur résonance, ajoute la chorégraphe «Duo fait de tombées et d'attrapés, il rappelle d'une certaine façon les naufrages et les sauvetages!»
Conçu pour être rendu par un seul couple, l'extrait a été revisité en profondeur par Mme Ledoyen. La chorégraphie d'une durée de 20 minutes intitulée Fragments d'oeuvres sera interprétée par trois duos de danseurs réunis pour dix représentations entre le 19 et le 22 juillet. Présentée à l'origine sur une scène intérieure, elle sera adaptée aux besoins de la cause. «Puisqu'ils évolueront sur un quai, j'ai modifié plusieurs mouvements pour protéger les danseurs», précise la conceptrice.
Pour forger les bases de leur collaboration, les deux femmes ont beaucoup échangé sur leur travail respectif. «Je suis allée à l'atelier de Carole, elle est venue en studio, Je suis ravie et de cette démarche qui alimente encore beaucoup ma réflexion», note Karine Ledoyen. Surtout, elle se dit satisfaite de l'équilibre entre les deux expressions artistiques. «Trop souvent lors de projets multidisciplinaires, la danse ne sert que d'accompagnement et finit par sembler accessoire. Ici, au contraire, j'ai souhaité un dialogue d'égal à égal entre les deux oeuvres. Et c'est réussi.»
L'événement les Passages insolites est présenté du 29 juin au 15 octobre 2017, dans le Vieux-Port et le quartier Petit Champlain. Plus d'information.

La présence d'Imposteur en plein coeur d'un quartier touristique achalandé offre une visibilité qui réjouit les membres du collectif Les Malcommodes.
Photo: Marc Robitaille

En participant à l'événement Passages insolites, la chorégraphe Karine Ledoyen est heureuse d'aller à la rencontre d'un public différent de celui fréquentant les salles de spectacle.
Photo: David Cannon