
— Au fil de leur carrière, Auguste et Louis Lumière ont déposé de multiples brevets, essentiellement dans le domaine de la photographie. On leur doit notamment les plaques «Étiquettes bleues», qui ont fait leur fortune.
De cet événement, peu de traces subsistent, à part quelques articles de journaux. «Le cinématographe est digne de tout intérêt. Il ouvre le jour sur tout un monde de possibilités. Tout cela est d'un effet saisissant; c'est le mouvement, moins le son et la vie. Le spectacle en vaut la peine, assurément. L'imagination, après cela, se met à galoper du côté de l'avenir, prévoyant les développements les plus merveilleux», publiait L'Électeur, l'ancêtre du quotidien Le Soleil. «Ce journaliste est dithyrambique. On ignore, toutefois, si c'était de la réclame; à l'époque, beaucoup de textes étaient commandés par des organisations. Il est difficile de savoir si c'était un article de journal ou une publicité déguisée. N'empêche que le cinéma captivait les gens. Ce fut un immense succès», raconte le professeur Jean-Pierre Sirois-Trahan.
Spécialiste du cinéma des premiers temps, il s'intéresse particulièrement à ce moment de l'histoire de la ville de Québec. Ce vendredi, il présentera, en collaboration avec l'organisme Antitube, une conférence sur le sujet, suivie d'une projection des films des frères Lumière. Un pianiste jazz sera sur place pour recréer l'ambiance de l'époque. L'activité se déroulera au Café Rencontre du Centre-ville, jadis le cabaret Baril d'huîtres, situé tout près du lieu de projection d'origine.
Parmi les films qui seront présentés figurent de petits bijoux, dont plusieurs en version restaurée. «Certaines de ces oeuvres sont extraordinaires! Les images sont aussi magnifiques, voire plus, que celles des films d'aujourd'hui. Elles ont une aura qui n'existe plus. Chacun des photogrammes pourrait être encadré. On voit qu'avant d'être un art narratif, le cinéma est un art plastique», observe le professeur.
Breveté en 1895, le cinématographe des frères Lumière était une véritable innovation dans le domaine. Pas plus gros qu'un appareil photo, il permettait à la fois de filmer des images et de les projeter. Cette invention est rapidement devenue une attraction, d'abord à Paris, puis dans le reste du monde. «Les frères Lumière étaient de jeunes entrepreneurs à la fine pointe de la technologie. En plus du cinématographe, ils ont inventé un procédé pratique de plaques sèches, qui a complètement révolutionné la photographie ainsi que la photo couleur. Avec Kodak, ils étaient les plus importants fabricants de plaques photographiques», relate Jean-Pierre Sirois-Trahan.
Assurément, il en aura beaucoup à raconter au cours de sa conférence. Il en profitera aussi pour présenter brièvement les activités de Scope, un groupe de recherche sur l'histoire du cinéma au Québec, récemment lancé. L'objectif: dépouiller toutes les archives qui existent sur le sujet afin d'en faire une synthèse. «On a souvent l'impression que Québec n'est pas une ville de cinéma, ce qui est faux. De grands cinéastes, dont Griffith et Hitchcock, sont venus tourner ici. Il y a aussi toute une histoire de salles, qui est extrêmement intéressante, et dont on sait très peu de choses. On veut renouveler la vision de l'histoire du cinéma à Québec et au Québec pour les cinéphiles et tous ceux qui désirent mieux connaître leur culture», dit-il.
Ce projet réunit également Julie Beaulieu, professeure au Département des littératures, Germain Lacasse, de l'Université de Montréal, et Louis Pelletier, de l'Université Concordia.
La conférence et la projection des films des frères Lumière auront lieu le 30 septembre, dès 20h, au 796, rue Saint-Joseph Est. Pour plus d'information: www.antitube.ca.