Métro, boulot, dodo. Qu’on le veuille ou non, notre vie quotidienne est réglée au millimètre près. C’était le cas, du moins, avant qu’un certain virus fasse son apparition et nous oblige à revoir notre emploi du temps. Exit l’heure de pointe pour aller travailler, tout comme les rendez-vous et les activités sociales.
Comment vit-on ce nouveau rapport au temps? C’est ce que tentera de comprendre une équipe de chercheurs réunis sous la gouverne de Virginie Van Wassenhove, spécialiste en neurosciences au centre CEA Paris-Saclay. Leur étude, intitulée Impact de la distanciation sociale sur la perception du temps, se déroule simultanément au Canada, en France, en Allemagne, en Angleterre, en Espagne et aux États-Unis.
Les participants sont invités à répondre à une série de questionnaires et de tests en ligne. L’étude se déroule en trois phases: pendant le confinement, deux semaines après le début du déconfinement et trois mois après la reprise normale des activités. Les données permettront aux chercheurs de comprendre les effets de la crise de la COVID-19 sur la perception du temps qui passe.
Professeur à l’École de psychologie et directeur du Laboratoire de recherche en psychologie de la perception de l’Université Laval, Simon Grondin pilote le volet canadien de cette étude avec deux étudiants, Esteban Mendoza et Pier-Alexandre Rioux. Depuis plusieurs années, ce chercheur s’intéresse à la notion du temps. Il a notamment publié l’ouvrage Le temps psychologique en questions aux Presses de l’Université Laval.
«Avec la pandémie, dit-il, les gens ont davantage conscience de l’aspect temporel de leur vie. Certains se plaignent que les journées passent trop lentement, d’autres ont l’impression de perdre la notion du temps. Durant les vacances de Noël ou d’été, il est courant de ne plus savoir quel jour on est, ce qui apporte son charme. Lors d’une pandémie, c’est moins charmant de se tromper. Puisqu’on ne sait pas quand la situation va revenir à la normale, l’impression peut être troublante.»
L’incertitude liée au temps que durera la crise peut provoquer de l’anxiété selon la personnalité de chacun. «Il y a des gens portés vers le moment présent qui s’en sortent assez bien. Pour ceux qui ont besoin de planifier leur futur, c’est plus angoissant. En ayant aucune perspective du temps, il devient très difficile de se faire à l’idée et de s’organiser.»
Autre facteur lié à la perception du temps: les conditions dans lesquelles se déroule le confinement. «Ceux qui doivent s’occuper de jeunes enfants à la maison tout en faisant du télétravail peuvent avoir l’impression de manquer de temps. Si les conditions sont bonnes – par exemple, si l’employeur diminue la charge de travail et permet une certaine flexibilité dans l’horaire, ou encore si les enfants sont assez âgés pour s’occuper eux-mêmes –, c’est moins stressant. La part d’anxiété peut être plus ou moins grande selon les conditions dans lesquelles la personne se trouve.»
Si certains se réjouissent de passer plus de temps seul ou en famille, d’autres ont peur de s’ennuyer. Avec un confinement qui s’étire, plusieurs ont entrepris de nouvelles activités, comme fabriquer du pain, jardiner ou faire des vidéos en ligne. «Si on ne meuble pas le temps, on est porté à croire qu’il défile lentement. Se distraire permet de porter son attention sur autre chose. Une autre raison pour laquelle on cherche à s’occuper, c’est qu’on est entraîné ainsi. Tout le monde a sa routine, son organisation du temps», ajoute le professeur.
Et vous, quel est votre rapport au temps?
Les personnes désirant participer à l’étude peuvent se rendre dès maintenant sur la page du projet et se créer un identifiant. Les données récoltées sont anonymes.