14 novembre 2025
Trois chiffres sur l’ambition climatique du Québec
Évelyne Thiffault, professeure au Département des sciences du bois et de la forêt et coauteure de l’avis Définir l’ambition climatique du Québec: cibles et trajectoires de décarbonation du Comité consultatif sur les changements climatiques, commente quelques données

Bien que les forêts aménagées du Québec soient un puits de carbone, l’agriculture, la perturbation des milieux humides et les produits du bois jetés aux dépotoirs annulent présentement l’effet des forêts.
— Getty Images / Paul Dubois
Selon la Loi sur la qualité de l’environnement, le gouvernement du Québec doit réviser sa cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) au moins tous les cinq ans. Il donc doit le faire d’ici le 31 décembre prochain. Le gouvernement a demandé au Comité consultatif sur les changements climatiques de lui fournir un avis sur le sujet ainsi que sur une cible visant la carboneutralité. Cet avis intitulé Définir l’ambition climatique du Québec: cibles et trajectoires de décarbonation a été déposé le mardi 11 novembre. La professeure Évelyne Thiffault met en lumière des chiffres issus de cet avis.
1,5°C
de hausse de température
«C’est la limite de la hausse de la température mondiale visée par l’Accord de Paris, par rapport aux niveaux préindustriels, rappelle Évelyne Thiffault. Dans un contexte de changement climatique, cette hausse de la température devrait limiter les dommages sur les écosystèmes et les populations humaines. Or, la température moyenne mondiale s’est située, en 2024, à 1,55°C au-dessus des niveaux préindustriels. À l’échelle du Québec, la température moyenne de 2024 a surpassé de 3,9°C la moyenne du 20e siècle. Cependant, ce n’est pas une raison pour baisser les bras, bien au contraire; c’est plutôt une occasion de redoubler d’efforts pour l’action climatique.»
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émission nette en 2045
«C’est la cible que recommande le Comité consultatif sur les changements climatiques pour l’ambition climatique du Québec. Cette cible est cohérente avec l’objectif de limiter la hausse de la température mondiale à 1,5°C. Cette cible signifie que le Québec sera carboneutre à partir de 2045. On aura réduit de 85% les émissions d’origine fossile par rapport au niveau d’émissions de 1990. On aura aussi mis au point et déployé des solutions technologiques permettant d’emprisonner de manière permanente une quantité de CO2 équivalente aux émissions résiduelles (c’est-à-dire des émissions qui resteront inévitables)», remarque la professeure Thiffault.
13,7 millions
de tonnes d’émissions de CO2 équivalent
«C’est la quantité moyenne d’émissions de GES émis par le secteur des terres au Québec (de son vrai nom: secteur de l’affectation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie) entre 1990 et 2022. Bien que les forêts aménagées du Québec soient un puits de carbone (c’est-à-dire qu’elles capturent, grâce à la photosynthèse, plus de CO2 atmosphérique qu’elles n’en émettent), l’agriculture, la perturbation des milieux humides, et les produits du bois issus des forêts québécoises et jetés aux dépotoirs sont, quant à eux, une source de CO2 dans l’atmosphère qui annule l’effet des forêts. Le secteur des terres ne fait présentement pas l’objet d’une cible au Québec, bien que ses émissions contribuent aussi au réchauffement climatique. Le Comité consultatif sur les changements climatiques recommande que ce secteur devienne aussi carboneutre d’ici 2045. Cela voudra dire notamment deux choses: d’abord, faire plus et mieux pour que les forêts québécoises croissent bien et fassent plus de photosynthèse, et ensuite mieux transformer le bois récolté dans nos forêts pour en faire des produits qui dureront toute une vie (et même plus), stockant ainsi à long terme le carbone qu’ils contiennent. Une cible pour ce secteur fera en sorte que les forêts, les produits du bois, les terres agricoles et les milieux humides du Québec pourront contribuer pleinement à l’ambition climatique du Québec», explique Évelyne Thiffault.
L'avis Définir l’ambition climatique du Québec: cibles et trajectoires de décarbonation a été rédigé par le Comité consultatif sur les changements climatiques, dont font partie trois membres de la communauté universitaire: la professeure Valériane Champagne-Saint-Arnaud, de la Faculté des sciences de l’administration, le professeur Lota Dabio Tamini, de la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation, et la professeure Évelyne Thiffault, de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. Ce comité est composé de 9 à 13 membres bénévoles, généralement issus du milieu scientifique et nommés pour un mandat de trois ans.
Propos recueillis par Manon Plante






















