
Q Ces deux actifs représentent-ils une bonne affaire pour un investisseur?
R Il s’agit d’une occasion en or à saisir. L’industrie du sport professionnel en général se porte relativement bien en Amérique du Nord. Elle a connu peu de gros changements en raison du ralentissement économique. Comme les conditions de crédit sont très difficiles, le dossier du Canadien et du Centre Bell attire seulement les candidats sérieux, pas de spéculateurs. Et le Canadien est particulièrement attrayant puisque sa valeur a presque doublé depuis son achat par George Gillett en 2001. Le magazine Forbes classe l’équipe au troisième rang dans la Ligue nationale pour les revenus d’exploitation. La même publication estime la valeur de l’équipe à 334 millions $US et celle du Centre Bell à 103 millions $US. Lorsque George Gillett s’est porté acquéreur de 80 % du capital-actions du club, il avait monté un plan de crédit très solide alors que le dollar canadien valait environ 40 % de moins que le dollar américain. L’an dernier, la parité a été atteinte. En 2001, la faiblesse de notre devise effrayait les acheteurs locaux potentiels. On pensait qu’un acheteur américain était mieux placé pour faire la transaction. George Gillett a quand même pris un risque parce que l’environnement financier était beaucoup plus spéculatif qu’aujourd’hui. On l’avait d’ailleurs accusé, au début, d’avoir acheté une franchise dans le but de la revendre. Mais ce n’était pas le cas. Il s’est révélé comme un passionné de sport et d’affaires.
Q Au nombre des acheteurs potentiels, lesquels sont les mieux placés pour remporter la mise?
R Je pense que la partie va se jouer entre le groupe d’investisseurs mené par Serge Savard, l’ancien joueur et ancien directeur général du Canadien, et Roustan Capital, une firme américaine propriété du financier Graeme Roustan, un Québécois d’origine. L’an dernier, cette entreprise a racheté Bauer, le fabricant d’équipement de hockey québécois, du géant Nike. Elle possède, entre autres, des centaines de centres sportifs. Quant au groupe dirigé par Serge Savard, il est très bon en affaires et il a une très bonne connaissance du hockey.
Q À quel point la dimension identitaire joue-t-elle dans ce dossier?
R Cela m’étonne que seulement 74 % des répondants à un récent sondage d’opinion Angus Reid aient déclaré trouver important que le nouveau propriétaire du Canadien soit québécois. Je me serais attendu à un pourcentage encore plus élevé. Dernièrement, le premier ministre du Québec a déclaré être prêt à aider financièrement tout investisseur disposé à garder le club à Montréal. En fait, on cherche un George Gillett québécois. Le Québec en a plusieurs. C’est une très bonne idée de favoriser un représentant de la fibre québécoise. Cela contribuerait à renforcer encore plus les liens entre la population et l’équipe. Cela dit, l’organisation fait tout pour concrétiser cet attachement. Et Gillett ne s’est pas égaré: il a conservé la tradition afin de coller à l’identité québécoise. Avant lui, le Canadien n’avait pas de politique relative à sa marque d’affaires. Depuis, on positionne la marque comme un produit. C’est pour ça que George Gillett a obtenu cet énorme retour sur son investissement. Encore plus que les performances sur la patinoire, les produits dérivés ainsi que l’engagement de l’équipe dans la collectivité expliquent la très grande popularité du Canadien.
Propos recueillis par Yvon Larose