Le suicide est un problème complexe et les solutions sont multiples. Depuis quinze ans, le Québec a fait des pas significatifs dans la prévention du suicide. Toutefois, le problème demeure, telle une fatalité. À chaque jour, au Québec, quatre personnes se suicident. C’est énorme! Nous pensons qu’une partie de la solution à ce problème est entre nos mains, nous les citoyens qui composons cette collectivité. Nous croyons qu’il est temps de dire à ceux qui souffrent et à tous ceux qui les entourent, que le suicide n’est pas la réponse à leur souffrance. Il existe d’autres solutions au suicide que l’on définit ici comme étant une mort intentionnelle causée par soi-même.
Afin de tenter d’expliquer le phénomène, plusieurs d’entre nous s’en remettent au choix individuel. Il repose sur les épaules de chaque personne de décider de son propre sort. La seule liberté de l’humain, entendons-nous parfois, réside dans le choix pour chacun de décider de sa vie, de sa mort. Cependant, les recherches sur le suicide nous apprennent qu’il y a équivoque, que cette quête de la mort exprime plutôt un désir profond d’arrêter de souffrir. Voilà l’essentiel! En s’enlevant la vie, la personne désire avant tout tuer sa souffrance. Il devient alors bien plus difficile pour nous de s’en remettre exclusivement au choix de la personne suicidaire car celle-ci a les capacités affaiblies par sa détresse, son mal d’être l’habitant tout entier et altérant potentiellement son jugement. Tout comme, après plusieurs années de prévention contre l’alcool au volant, il est maintenant impensable de laisser une personne qui a bu décider seule de sa capacité à conduire une voiture, une personne qui souffre ne peut être laissée à elle-même avec ses idées suicidaires. Elle a besoin d’aide. Un sondage pancanadien de la firme Léger Marketing, commandé par l’Association québécoise de prévention du suicide, datant de septembre dernier, nous indiquait que 42 % des Québécois considèrent le suicide comme un geste acceptable. Ce chiffre grimpe à 50 % lorsque les répondants ont un diplôme universitaire. Mauvaise nouvelle puisque des recherches confirment l’existence d’un lien entre le niveau d’acceptabilité de la population et son taux de suicide. Tel qu’il était stipulé dans le communiqué relatant les résultats du sondage, plus les citoyens d’une province considèrent le suicide comme une option, plus le taux de suicide de cette province est élevé. Une partie de la réponse à notre taux de suicide résiderait donc dans notre tolérance face à ce geste irrémédiable.
Notre grande tolérance face au suicide ne nous place-t-elle pas en contradiction avec nous-mêmes à l’égard de la souffrance des autres? La perte d’une femme ou d’un homme par suicide est un malheur pour ses proches et la collectivité. De plus, chaque personne qui se suicide entraîne par sa mort, en moyenne, 20 personnes dans un deuil difficile. Le suicide nous meurtrit, il est temps d’arrêter l’hécatombe. Nous pensons qu’il est venu le moment d’affirmer à ceux qui souffrent, à leur entourage et aux membres de notre collectivité que le suicide n’est pas une option. Il existe des ressources qui peuvent aider à trouver des solutions dont la ligne téléphonique 1 866 appelle.
Nous croyons fermement qu’il faut agir collectivement. N’attendons pas passivement que les gouvernements ou d’autres organisations éliminent seuls le problème du suicide. C’est une utopie! Comme citoyens, nous sommes tous responsables. Et nous devons agir. Les femmes et les hommes que nous sommes doivent réfléchir à leur position à l’égard du suicide. Et lorsqu’une majorité d’entre nous affirmera haut et fort que le suicide, ce n’est pas une option, nous avons la conviction que moins de gens se suicideront. Car l’absence d’une position claire sur le suicide, tue également à chaque jour.
BRUNO MARCHAND
Au nom de 13 intervenants membres du Regroupement des représentants en prévention du suicide des établissements d’enseignement supérieur régions 03-12