
La transition entre le plancher et la première marche est celle qui exige le plus d'attention, en particulier pour les personnes âgées.
— Marc Robitaille
Les chercheurs ont invité dans leur laboratoire 16 personnes âgées actives et en bonne santé, dont l'âge moyen était 70 ans, et 16 jeunes adultes, dont l'âge moyen était 25 ans, afin de déterminer comment la façon de descendre un escalier est altérée par le vieillissement normal. Sous l'œil d'un système de captation et d'analyse des mouvements, les sujets devaient arpenter une plateforme droite puis descendre cinq marches à une vitesse naturelle tout en nommant le plus rapidement possible la couleur de mots apparaissant sur des écrans placés au bas de l'escalier. Pour compliquer leur travail, les mots choisis étaient des noms de couleurs qui ne correspondaient pas à leur couleur à l'écran. Par exemple, le mot «jaune» pouvait apparaître en rouge, en vert ou en bleu.
Résultat? La double tâche influence la démarche et le temps de réponse de tous les sujets, mais les effets sont plus prononcés chez les participants âgés. Leurs mouvements témoignent d'une plus grande prudence –le dégagement entre le pied et la marche est plus grand– et le coût attentionnel engendré par la double tâche est plus élevé. «Leurs mouvements semblent moins automatiques que ceux des jeunes et ils sont davantage affectés par l'interférence visuelle, surtout dans la phase de transition entre la plateforme et la première marche», précise l'un des auteurs de l'étude, le professeur Bradford McFadyen, du Département de réadaptation.
Les sujets âgés qui ont pris part à l'étude étaient des gens particulièrement en forme, poursuit le chercheur. «Malgré cela, on observe un déclin dans leur performance. Lorsque le vieillissement est accompagné de problèmes physiques ou d'une diminution des capacités cognitives, l'importance de ce déclin risque d'être encore plus grande.» Le fin mot sur cette question pourrait venir des expériences que son équipe a menées depuis avec des personnes qui ont déjà fait des chutes et avec des sujets souffrant de trouble cognitif léger.
Le professeur McFadyen ne veut pas ameuter les personnes âgées au sujet des risques de chute dans les escaliers, mais il leur suggère d'éviter de diviser leur attention visuelle, surtout au moment d'attaquer la première marche. «Il faut bien jauger la situation dans la phase de transition. Après, on adopte un mode automatique et la plupart des gens ne courent pas de risques particuliers.»
Par ailleurs, il invite les architectes et les personnes responsables des aménagements physiques à porter une attention particulière aux besoins des personnes âgées. «Il y a un déclin inévitable qui vient avec l'âge dans notre habileté à descendre des marches. Il faut que la conception des escaliers en tienne compte de façon à réduire les risques d'accident.»
L'étude parue dans Experimental Gerontology est signée par Alessandro Telonio, de l'Université de Sherbrooke, Sophie Blanchet, Sophie Villeneuve et Bradford McFadyen, du CIRRIS, Constantinos Maganaris, de la Liverpool John Moores University, et Vasilios Baltzopoulos, de la Brunel University.