11 septembre 2025
Tortues des bois: un programme d'élevage en captivité pourrait aider les populations sauvages
La croissance et la survie de jeunes tortues libérées en nature après avoir été incubées et élevées en captivité laissent entrevoir des jours meilleurs pour cette espèce vulnérable

L'étudiante-chercheuse Félicia Beaulieu et une tortue des bois adulte munie d'un émetteur permettant son suivi télémétrique.
— Léane Gamache
Au cours du dernier siècle, les effectifs de la tortue des bois auraient diminué de moitié dans l'ensemble de son aire de répartition. Cette baisse est telle que l'espèce est maintenant classée vulnérable au Québec et menacée au Canada. Bonne nouvelle toutefois, un programme qui consiste à relâcher en nature des tortues incubées et élevées en captivité pourrait donner un coup de pouce à l'espèce.
C'est ce qui se dégage d'une communication qui sera présentée par Félicia Beaulieu, étudiante-chercheuse à l'Université Laval, dans le cadre du Congrès annuel de la Société d'herpétologie du Canada qui aura lieu du 12 au 15 septembre à l'Université Laval. Environ 150 spécialistes des reptiles et des amphibiens sont attendus sur le campus pour l'occasion.
Les travaux de l'étudiante-chercheuse, réalisés sous la supervision de Marc Mazerolle, professeur au Département des sciences du bois et de la forêt et chercheur au Centre d'étude de la forêt, visent à évaluer l'efficacité d'un programme mis sur pied il y a près de 20 ans par le ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP). Ce programme vise à assurer la conservation de la tortue des bois dans l'Est du Québec.
Depuis 2012, un volet spécial s'est ajouté à ce projet. «Des œufs de tortues des bois prélevés en milieu naturel dans le Témiscouata sont incubés au Biodôme de Montréal. Les jeunes qui en éclosent sont élevés en captivité. Lorsqu'ils atteignent l'âge de 12 mois ou de 24 mois, ils sont libérés à proximité du site de ponte d'où ils proviennent. Jusqu'à présent, 350 tortues juvéniles ont été ainsi relâchées en milieu naturel», signale l'étudiante-chercheuse.
Le but de cette opération est de mettre les jeunes tortues à l'abri des dangers qui les guettent pendant une période critique de leur vie. «Leur petite taille les rend très vulnérables aux prédateurs. Selon une étude, le taux de survie annuelle des juvéniles peut être aussi bas que 6%», précise l'étudiante-chercheuse.

La petite taille des jeunes tortues des bois les rend vulnérables à la prédation.
— Félicia Beaulieu
Les analyses effectuées par Félicia Beaulieu révèlent d'importantes différences dans le taux de croissance des tortues sauvages et des tortues élevées en captivité. «En nature, les œufs éclosent en septembre et les jeunes commencent leur hibernation quelques semaines plus tard. En captivité, elles demeurent actives toute l'année. Le résultat est qu'en 10 jours de vie, les jeunes en captivité atteignent une taille qui équivaut à celle de tortues sauvages de 10 mois.»
Le taux de survie annuelle des jeunes relâchés en nature semble également meilleur. «Chez les jeunes relâchés à l'âge de 24 mois, il est de 0,98, soit l'équivalent de celui des adultes. En général, le taux de survie des jeunes tortues en milieu naturel est deux fois plus bas que celui des adultes.»
Le programme d'incubation artificielle et d'élevage en captivité des tortues des bois semble donc livrer des résultats très encourageants, constate Félicia Beaulieu. «Il nous reste à démontrer que les tortues élevées en captivité en début de vie se reproduisent aussi bien que celles des milieux naturels. Nous pourrons bientôt étudier la question parce que les premières tortues relâchées atteindront bientôt leur maturité sexuelle.»
Outre Félicia Beaulieu et Marc Mazerolle, les scientifiques qui ont participé à cette étude sont Geneviève Bourget, du MELCCFP, et Odile Colin, du Biodôme - Espace pour la vie Montréal.
Pour connaître les autres communications présentées lors du Congrès annuel de la Société d'herpétologie du Canada, consultez le programme de la rencontre.