Le dopage, cette pratique qui consiste pour un sportif à augmenter ses capacités physiques ou mentales à l’aide de substances interdites, est un phénomène bien connu qui engendre des effets négatifs sur la santé. Afin de dissuader les athlètes de consommer de telles substances, il existe les tests antidopage et l’éducation antidopage.
«On reconnaît depuis peu que l’éducation antidopage pourrait également s’adresser aux personnes qui, comme les entraîneurs, ont une relation de proximité avec les athlètes», explique Sophianne Dionne, chargée de cours et coordonnatrice de la Chaire de recherche Sécurité et intégrité en milieu sportif au Département d’éducation physique de l’Université Laval.
Selon elle, on sait peu de choses sur les croyances, les connaissances et les attitudes des entraîneurs en ce qui concerne la prévention du dopage sportif. «C’est dans ce contexte, poursuit-elle, que j’ai axé ma thèse de doctorat en psychopédagogie sur la compréhension et l’identification des facteurs et des déterminants qui incitent ou encore qui freinent les entraîneurs à intervenir pour prévenir le dopage sportif. Dans la littérature, les résultats de recherche révèlent que, règle générale, les entraîneurs sportifs sont favorables à la prévention et qu’un certain pourcentage considère ne pas avoir l’expertise pour intervenir. Ils croient que cela doit être fait par des spécialistes.»
Dans sa thèse, la chargée de cours s’est intéressée plus particulièrement à la consommation de substances légales stimulantes chez les joueurs de hockey âgés entre 12 et 16 ans. Pour l’essentiel, il s’agissait de boissons énergisantes qui maintiennent alerte et éveillé. Consommées en trop grandes quantités, ces boissons peuvent entraîner des problèmes cardiaques.
Il n’existe pas de statistiques sur l’importance du dopage sportif au Québec, mais certains chiffres sont révélateurs. Ainsi, en 2010, Claude Goulet, professeur au Département d’éducation physique et directeur de thèse de Sophianne Dionne, a mené une enquête auprès d’un grand nombre d’athlètes québécois âgés en moyenne de 15,5 ans. «Le quart des répondants, indique-t-elle, ont révélé avoir consommé au moins une des substances interdites par le Comité international olympique.»
Son intérêt pour le dopage sportif remonte à loin. «Je me suis toujours intéressée à ce sujet, raconte-t-elle. J’étais en quelque sorte fascinée de voir tout ce que les athlètes étaient prêts à faire pour atteindre de hautes performances. Au-delà de cet intérêt plus personnel, je souhaitais comprendre ce qui pourrait amener des athlètes à consommer de telles substances. J’étais également préoccupée par les conséquences négatives sur la santé que pouvait impliquer une telle consommation.»
Trois études
La chargée de cours a fait la soutenance de sa thèse il y a quelques semaines. Sa recherche s’intitulait «La prévention du dopage sportif chez les jeunes joueurs de hockey sur glace: développement et évaluation d’un programme de formation auprès des entraîneurs». Cette recherche doctorale a pris la forme de trois études. Chacune fera l’objet d’une publication à venir dans des revues scientifiques. La première a consisté à joindre de nombreux entraîneurs au Québec par l’intermédiaire de leur fédération sportive respective. Hockey, soccer, football et plusieurs autres sports ont été approchés. Cette enquête en ligne a permis de savoir ce que font les entraîneurs comme interventions en matière de prévention du dopage. En tout, 195 entraîneurs ont collaboré à l’enquête.
«Après l’analyse des réponses au questionnaire, neuf comportements sont ressortis, lesquels ont été testés auprès d’une centaine d’entraîneurs en hockey sur glace, souligne Sophianne Dionne. Je me suis inspirée, dans ma pratique, de ces observations. J’ai fait une discussion de groupe avec les athlètes que j’entraîne portant sur la prévention de la consommation de substances pour améliorer les performances sportives. Je leur ai aussi fourni des documents pour prévenir la consommation de ces substances.»
La troisième partie de la thèse a consisté à concevoir une formation dans le but d’augmenter les connaissances des entraîneurs et la fréquence des interventions par rapport à la problématique. Cette formation a nécessité la collaboration de cinq chercheurs de l’Université Laval, soit Claude Goulet (chercheur principal), Vicky Drapeau et Sylvie Parent, du Département d’éducation physique, ainsi que Pierre Valois et Frédéric Guay, du Département des fondements et pratiques en éducation. Elle comprend notamment des activités d’apprentissage et donne accès à des vidéos de deux à trois minutes chacune conçues par des experts en nutrition, en préparation physique et en préparation mentale.
«D’après la littérature scientifique, dit-elle, la première chose à faire pour augmenter les performances sportives est de s’assurer d’optimiser ce que l’on peut faire dans une perspective de préparation mentale, physique et nutritionnelle.»
La formation se fait par Internet et dure environ deux heures. Elle a été testée auprès d’un petit nombre d’entraîneurs de hockey. Ceux-ci ont répondu à un questionnaire avant et après la formation. À la fin de chacun des modules, ils recevaient une rétroaction. Des documents étaient disponibles pour téléchargement. En général, les participants se sont dits satisfaits de la formation reçue.
«Le message à retenir, affirme Sophianne Dionne, est qu’il est important de prendre position face à ce problème du monde du sport, malgré le malaise que cela engendre bien souvent.»