Si le père Noël souhaite constituer un attelage représentatif des différentes populations de caribou du monde pour sa grande virée annuelle, il pourra désormais le faire grâce aux travaux d'une équipe de recherche de l'Université Laval. En effet, ces chercheurs ont séquencé le génome de ce cervidé et ils ont créé une puce à ADN qui permet de distinguer ses différentes populations.
Rappelons que les régions nordiques d'Amérique du Nord, d'Europe et d'Asie abritent plusieurs écotypes de caribou, eux-mêmes constitués de populations génétiquement distinctes. Au Québec, par exemple, les populations de ce cervidé sont regroupées en trois écotypes: le caribou migrateur, qui effectue des déplacements annuels de plusieurs centaines de kilomètres entre la toundra et la forêt boréale, le caribou boréal, qui vit à l'année dans les forêts boréales, et le caribou montagnard, qui est confiné aux sommets des Chic-Chocs en Gaspésie et des monts Torngats au Nunavik et au Labrador.
«Les caribous des trois écotypes se ressemblent beaucoup physiquement et il est très difficile de les distinguer, souligne Steeve Côté, du Département de biologie et du Centre d'études nordiques. Il est important de pouvoir le faire afin d'assurer la conservation de cette espèce et de sa diversité génétique, mais aussi pour documenter les cas de braconnage et pour trancher des questions d'ordre légal étant donné que les règlements de prélèvement diffèrent selon les écotypes.»
C'est d'ailleurs pour répondre à des besoins de suivi et de protection du caribou exprimés par les biologistes du ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs (MFFP) que Steeve Côté et ses collègues Claude Robert, du Département des sciences animales, et Arnaud Droit, de la Faculté de médecine, ont élaboré un projet visant le développement d'outils pour l'analyse du génome du caribou. Grâce à un soutien financier de 3M$ de Génome Québec et de Génome Canada obtenu en 2018, ils ont pu réaliser ce projet.
«Nous avons utilisé des échantillons de poil ou de peau d'environ 1600 caribous fournis par le MFFP pour séquencer le génome du caribou, explique Claude Robert. Cela nous a permis de découvrir des variations génétiques qui distinguent les trois écotypes du Québec. Ces données ont servi à la fabrication d'une biopuce qui comprend également des données sur le génome du renne fournies par un chercheur finlandais. Nous croyons que notre puce est efficace pour toutes les populations de caribou et de renne dans le monde.»
La version finale de la biopuce est maintenant fonctionnelle et les responsables du projet ont rendu public son design pour qu'elle soit accessible au plus grand nombre. Génome Québec, par son Centre d'expertise et de services, peut effectuer le genotypage des échantillons qui lui sont acheminés. «Comme il faut une bonne base en bio-informatique pour interpréter des données de séquençage, nous avons construit un portail qui permet aux usagers de verser les données produites par Génome Québec, de poser des questions au sujet des caribous sur lesquels ont été prélevés les échantillons et d'obtenir rapidement des réponses, explique Claude Robert. Il nous semblait essentiel de rendre la biopuce et le portail accessibles aux chercheurs et aux biologistes qui étudient le caribou pour faciliter les travaux visant la conservation et la protection de cette espèce.»