
«C'est un film très drôle et en même temps très profond», dit François Nault, professeur à la Faculté de théologie et de sciences religieuses. «On voit très bien le problème social que pose la notion de paresse. Arrêter de promouvoir le travail dans notre société, c'est être en porte-à-faux par rapport à la croissance économique et à la productivité», explique le théologien, organisateur du colloque ayant pour thème «La paresse: vice ou art de vivre?», qui se tiendra au local 813 du pavillon Félix-Antoine-Savard, à partir de 13h30, le jeudi 13 octobre, pour se poursuivre le lendemain.
Au programme figurent des conférences données par des professeurs et des chercheurs qui aborderont la notion de paresse sous l'angle de la théologie, de la philosophie, de la psychanalyse et de la littérature. Pour sa part, François Nault a choisi de parler du personnage de Bartleby, ce héros d'une nouvelle d'Herman Melville, parue en 1853 et qui a fait l'objet de plusieurs adaptations au théâtre et au cinéma. Engagé comme copiste par un notaire, Bartleby, de prime abord travailleur et consciencieux, glisse progressivement dans la paresse, pour finalement refuser d'accomplir tout travail. «I would prefer not to» («Je préférerais ne pas»), répond-il à son patron lorsque ce dernier lui demande d'effectuer une tâche. Occupant le bureau en permanence, refusant de quitter les lieux, même après son renvoi, Bartleby devient en quelque sorte un symbole de la résistance passive.
Quand on lui demande de parler des raisons l'ayant incité à organiser un colloque sur la paresse, François Nault affirme que le sujet constitue un bon antidote au discours ambiant. «Les partis politiques prônent le plein emploi et les personnes qui ne peuvent suivre la parade sont laissées pour compte, dit-il. Les chômeurs sont dévalorisés dans une société qui a fait du travail un dieu.» Dans son essai intitulé L'Évangile de la paresse, publié en 2015 aux Éditions MédiasPaul, François Nault tente de démontrer qu'on peut interpréter la Bible comme un enseignement prêchant la paresse, pourtant considérée comme l'un des sept péchés capitaux par l'Église catholique. «Par exemple, Jésus a mené une vie de vagabond et de mendiant, affirme-t-il. Il débauchait les pêcheurs en leur disant de laisser là leurs filets et les encourageait à tout quitter pour le suivre. Même si dans les faits, Jésus était menuisier, son enseignement se caractérise par l'absence d'injonction de travailler.»
D'un côté, donc, une société obnubilée par l'importance du travail et de la productivité et, de l'autre, un courant de pensée qui revendique non seulement le droit à la paresse, mais qui en fait la promotion comme un art de vivre: tel est l'argumentaire de François Nault dans ce colloque. «Ralentir le rythme, c'est difficile dans la société actuelle, insiste-t-il. Des gens, souvent de gros travailleurs, meurent quelque temps après avoir pris leur retraite. Dans une autre tranche d'âge, nos enfants sont hyper stimulés par toutes sortes d'activités et de programmes.» Et si l'on prenait le temps de souffler?
Ce colloque constitue le premier d'une série de rencontres qui seront consacrées à revisiter les sept péchés capitaux, ainsi appelés parce qu'ils entraîneraient à commettre d'autres péchés, selon la tradition chrétienne, rappelle François Nault. Au cours des prochaines années, le professeur a l'intention de revisiter la gourmandise, l'avarice, la luxure, l'orgueil, l'envie et la colère.
Programmation du colloque