
Ces dernières années, la qualité audiovisuelle du jeu vidéo a atteint un niveau de détails remarquable.
— Petit_louis
«Action, jeux de rôle, simulation, stratégie, sport: les jeux vidéo d'aujourd'hui touchent à une grande variété de genres, indique le chargé de cours Vincent Mauger, de l'École de design. Parmi les plus populaires, on compte notamment les jeux vidéo plus traditionnels comme les jeux de puzzle ou de simulation, tels Tetris ou Minecraft, et les jeux multijoueurs de sports ou d'action.»
Le jeudi 17 novembre, à la bibliothèque Gabrielle-Roy de Québec, Vincent Mauger a prononcé une conférence sur la scénarisation des univers virtuels interactifs, à l'occasion des Rencontres du numérique de l'Institut technologies de l'information et sociétés.
Produit culturel électronique original, cet outil audiovisuel numérique immensément populaire permet une interaction forte et active avec le joueur. Ce dernier choisit, à partir d'une liste d'actions préalablement imaginées et déterminées, celles qui lui plaisent pour influencer le déroulement du récit. «Il faut fournir l'expérience de la liberté au joueur, affirme Vincent Mauger. Lui donner le pouvoir est fondamental.»
Ces dernières années, la qualité audiovisuelle du jeu vidéo a atteint un niveau de détails remarquable grâce à une technologie en constante évolution. «Faune, flore, architecture, costumes, paysages, tous les aspects visuels sont aujourd'hui exploités à fond pour favoriser l'immersion du joueur dans un environnement aussi complexe que précis et détaillé, explique le chargé de cours. Dans Assassin's Creed 3, par exemple, le coeur de l'action se déroule durant une simulation de l'Amérique coloniale au 18e siècle puisque le protagoniste prend part à la Révolution. L'environnement illustre vraiment de beaux détails, notamment ceux de la reconstitution de la ville de Boston à partir de cartes d'époque.»
Dans l'équipe de concepteurs d'un jeu vidéo, le scénariste qui occupe le poste de designer d'éléments narratifs est investi d'une lourde responsabilité. «Il fait plus que de la scénarisation comme telle, soutient Vincent Mauger. Il est responsable de la construction d'un monde et il doit fournir aux concepteurs des ressources qui vont aider à réaliser le projet, tout en étant sensible aux limites technologiques.»
Selon lui, les mondes sortis de l'imagination des scénaristes peuvent paraître évanescents, mais ils sont en fait très concrets. En ce sens, la trame narrative s'avère assez contrôlée pour atteindre la plus grande cohérence possible. «Le scénariste de jeu vidéo doit imaginer de façon réaliste les fondations d'un monde interactif, poursuit-il. Il doit définir diverses composantes telles la taille d'une planète, la forme des continents, les cités d'un pays et la culture d'une nation. Cette culture comprend notamment une histoire avec un grand «H» ainsi que des mythes fondateurs. Dans la culture populaire, un grand nombre des mondes artificiels créés sont souvent d'inspiration pseudo-médiévale ou nous projettent dans des civilisations futuristes et extraterrestres.»
Le scénariste doit également créer de toutes pièces des personnages crédibles dont la psychologie permet des rapports réalistes. Il doit inventer une intrigue générale vraisemblable et suffisamment captivante pour retenir le joueur à sa console jusqu'à la fin du jeu. C'est qu'un jeu vidéo dure en moyenne un grand nombre d'heures; c'est long comparativement à un film. «Il faut donc toujours de la nouveauté pour maintenir l'intérêt du joueur, souligne Vincent Mauger. Et définir le rythme idéal est un sacré défi!»
Dans les récits numériques, comme dans tout récit de fiction, l'action dramatique est essentiellement basée sur la notion de conflit. Mais dans un monde numérique, le conflit ne serait trop souvent qu'externe. «Il est difficile dans ce type de construction fictionnelle de faire vivre des conflits internes aux personnages, comme on peut le faire dans un roman ou au théâtre, explique le chargé de cours. La technologie permet difficilement d'«entrer» dans la tête d'un personnage.»
Espionnage, fantasy, horreur, western, mythologies, ninjas, pirates, super-héros, vampires ou zombies: le jeu vidéo explore une multitude de genres et de thématiques. L'une d'elles est l'aspect réflexif des relations interpersonnelles. Une certaine classe d'utilisateurs demande des histoires plus profondes, humaines, qui font davantage réfléchir.
«Certains jeux vidéo interactifs font penser à des films d'auteurs, indique-t-il. Par exemple, That Dragon, Cancer est le récit autobiographique de parents ayant vécu avec un jeune enfant atteint d'une tumeur rare. Le jeu partage des émotions et des souvenirs des parents au long de cette difficile épreuve. C'est un drame interactif. Le joueur vit leur dynamique, leur peine. Il constate l'absurdité et la stérilité de l'environnement hospitalier. Des mécaniques communes aux jeux vidéo permettent d'interagir avec les personnages.»