«Je pense qu’est en train de s’inventer une nouvelle religion qui a pris le nom de spiritualité», affirme André Couture, auteur d’un article portant sur le livre de spiritualité contemporaine en tant que lieu privilégié pour l’étude du Nouvel Âge, dans un numéro récent de la revue Sciences religieuses. «À l’instar de toutes les religions, la spiritualité possède des croyances qui sont autant de clichés tels que le karma, le libre choix, la réincarnation, les anges, de même que des rites, comme la méditation, le port de cristaux, la consultation de voyant et le tarot, dit-il. Elle est diffusée à travers le réseau des librairies ésotériques, des maisons d’édition spécialisée ou des directeurs de collection. Ces maisons et ces directeurs fonctionnent à toutes fins pratiques comme de super-gourous ou de nouveaux grands-prêtres, occultés mais non moins réels. Ils savent parfaitement ce que l’homme et la femme contemporains doivent croire et faire pour obtenir leur salut et exercent sur eux un contrôle qui n’a rien à envier à celui qu’ont pu exercer les grandes institutions religieuses.»
Les énergies intérieures
Les nouvelles spiritualités contemporaines reposent sur certains mythes de création, constate André Couture. De la constellation des Poissons rattachée aux valeurs d’autorité, d’obéissance à la loi, le monde serait passé à une ère nouvelle, celle du Verseau, qui privilégie l’autonomie, la paix et l’harmonie. On assiste également à une redéfinition de la personne humaine. Si le christianisme dit que la personne est une libre créature de Dieu et que cette liberté doit l’amener à entrer en relation avec Dieu, le Nouvel Âge enseigne que l’être humain a des pouvoirs illimités et qu’il ne doit s’appuyer sur rien d’autre que lui-même. «Plus que jamais, le salut est une affaire individuelle qui dépend de l’évolution personnelle de chacun et n’a plus à passer par des médiations extérieures comme les prêtres et les églises, explique André Couture. Par exemple, les anges sont devenus des énergies intérieures garantissant à chacun qu’il a choisi sa situation présente et que personne, même Dieu, ne doit le juger dans la quête de sa propre perfection.»
Même s’il convient que beaucoup de personnes y ont découvert un sens à leur vie, André Couture estime que le discours véhiculé par le Nouvel Âge demande à être critiqué, comme tout autre discours. Quant au terme spiritualité, il suit l’air du temps. «Si on l’utilise aujourd’hui pour se dissocier du christianisme et de toute autre religion, il faut se souvenir que la spiritualité a d’abord été un chapitre de la théologie chrétienne, l’Esprit étant un don promis et communiqué par Jésus», dit-il.