
La surconsommation de boissons sucrées est liée à l'épidémie d'obésité et de surpoids ainsi qu'au cortège de problèmes de santé qui y est associé. Certains croient qu'il est temps que le Canada, à l'instar de nombreux pays, instaure une surtaxe sur ces produits.
Malgré les campagnes de sensibilisation et malgré la réduction de l'offre dans certains milieux, entre autres dans les écoles, la consommation de boissons sucrées demeure très élevée au pays. En 2015, les Canadiens occupaient le 10e rang mondial à ce chapitre avec une consommation annuelle moyenne de 88 litres par personne. Devant l'ampleur du problème, certains croient qu'il est temps de suivre l'exemple de nombreux pays et d'instaurer une taxe spéciale sur ces produits.
Yann Le Bodo s'intéresse à la question de la taxation des boissons sucrées depuis 2012. Professionnel de recherche au Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec et doctorant en santé communautaire à la Faculté de médecine, il publiait l'année dernière avec Philippe De Wals, de la Faculté de médecine, et Marie-Claude Paquette, de l'Université de Montréal, un ouvrage synthèse sur la question intitulé Taxing Soda for Public Health: a Canadian Perspective. Leur analyse des cas de 20 pays qui ont imposé une surtaxe sur les boissons sucrées suggère que cette mesure peut avoir une incidence sur la consommation de boissons sucrées. «Au Mexique, par exemple, une taxe qui a haussé le prix moyen des boissons sucrées de 9% a été associée à une baisse de 7% de leur consommation après deux ans. C'est loin d'être négligeable considérant la difficulté de modifier les comportements alimentaires», souligne Yann Le Bodo.
Une surtaxe sur les boissons sucrées peut produire des effets sur trois plans, rappelle-t-il. D'une part, parce qu'elle augmente le prix d'achat des boissons sucrées, elle peut induire un changement de comportements chez les consommateurs. D'autre part, elle peut générer des recettes fiscales servant à financer des programmes de prévention dans le domaine de la santé. Enfin, elle peut constituer un signal pour les consommateurs, en leur rappelant que ces produits ne sont pas recommandables, et pour les fabricants, en les incitant à améliorer leurs produits. «Une surtaxe sur les boissons sucrées ne peut, à elle seule, solutionner les problèmes de surpoids et d'obésité, mais elle peut faire partie d'un éventail diversifié de stratégies en santé publique», estime Yann Le Bodo. Reste à savoir si l'ampleur des problèmes causés par les boissons sucrées au Canada a atteint le point névralgique qui assurerait l'acceptabilité sociale d'une telle mesure.
Le chercheur développera son argumentaire sur la question le mercredi 1er novembre, à 15 h 30, au pavillon des Services, lors d'une table ronde qui se déroulera le dans le cadre de l'école internationale d'automne des Hautes Études internationales (HEI). Sylvie Bernier, championne olympique et chroniqueuse à Radio-Canada, et Antoine Genest-Grégoire, de la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l'Université de Sherbrooke, apporteront aussi leur point de vue sur le sujet. L'école internationale d'automne sur la sécurité alimentaire des HEI se déroule du 30 octobre au 4 novembre sur le campus. Organisée cette année par la Chaire de recherche en droit sur la diversité et la sécurité alimentaires et par l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF), elle a pour thème «Enjeux du sucre dans la société et dans le monde».