Ils ont eu l'idée de proposer une activité à leurs collègues permettant d'aménager les cours de deux écoles d'une communauté innue dont les bâtiments venaient d'être agrandis. André Casault, le professeur responsable de l'atelier «Habitats et cultures» a trouvé le projet emballant. Et pour cause, il entretient, comme il l'explique, «une relation fidèle avec les Innus» depuis de nombreuses années.
Pour s'inspirer, les étudiants ont utilisé les œuvres produites à l'occasion d'un concours de dessin ayant pour thème le jeu, auquel les élèves de l'école primaire Johnny Pilot, à Uashat, et de l'école Tshishteshinu, à Maliotenam, ont participé. Ces deux établissements se situent dans cette communauté innue de la Côte-Nord. «Sur leurs dessins, on retrouve beaucoup d'éléments de leur culture, des shaputuans volants (une tente conique, NDLR), la rivière et beaucoup, beaucoup d'enfants,» raconte Léa-Marie Caron, une des participantes, étudiante à la maîtrise.
Les adultes ont aussi nourri la réflexion des étudiants travaillant sur ce projet d'aménagement. Les directrices des écoles et des représentants de la communauté ont effectué le voyage jusqu'à Québec pour raconter leur culture aux personnes participant au projet et leur permettre de mieux s'ancrer dans le contexte innu. Du 7 au 19 septembre, 20 équipes, intégrant des étudiants des programmes d'architecture de l'Université Laval, de l'Université Laurentienne et de l'UQAM, ont donc conçu de nouveaux espaces autour des écoles.
«Actuellement, les cours sont très peu aménagées, témoigne André Casault. On espère que les idées amenées par les étudiants vont permettre de faire germer des projets. C'est souvent plus facile de solliciter du financement lorsqu'on dispose d'une présentation visuelle.» La plupart des équipes d'étudiants ont mis l'accent sur la vision innue du territoire dans leurs esquisses de cours. Les projets d'aménagement disposent souvent d'un boisé, d'un espace pour jouer avec l'eau et misent sur des matériaux naturels comme la pierre et le bois.
«Plusieurs des intervenants nous ont expliqué à quel point il était important que les élèves retrouvent dans la cour des éléments liés à la communauté innue, car cela les aide à mieux s'approprier leur culture», témoigne l'étudiante Léa-Marie Caron. Une autre équipe a ainsi imaginé une zone dans la cour où l'on retrouve un bout de forêt permettant de se déplacer d'arbre en arbre, une petite montagne constituée de buttes artificielles et même une plage pour jouer au volleyball. Sans parler de l'omniprésence du bois et des cordes tressées.
Soucieux de laisser une trace de leur passage, une vingtaine d'étudiants des universités Laval et Laurentienne ont d'ailleurs bâti, au début d'octobre, un module de jeu pour chacune des cours d'école. «Une quarantaine d'élèves grimpaient déjà dans notre shaputuan en bois inachevé quand on est revenus de dîner», se souvient l'étudiant à la maîtrise Louis-Philippe Leduc, dont l'équipe a remporté le prix de construction pour le projet «Metueu», qui signifie «il joue» en innu. «Les élèves étaient très enthousiastes; ils voulaient vraiment aider, renchérit sa collègue Naomi Pellerin-Swenne. Il faut dire qu'actuellement, il n'y pas grand-chose pour jouer dans la cour, surtout composée de sable.»
Même dénuement dans la cour de l'école Tshishteshinu à Maliotenam, qui dispose maintenant d'un module de jeu en forme d'araignée, fruit du projet gagnant intitulé «Nœuds bien fondés» d'une équipe d'étudiants de l'École d'architecture McEwen de l'Université Laurentienne. Ancrée solidement dans le sol à l'aide de huit billots de bois, cette toile sert déjà de lieu de rencontre et de véhicule imaginaire aux élèves. Leur rêve? Disposer bientôt de nouveaux jeux, et surtout de voir tomber les clôtures qui empêchent actuellement les petits et les grands de s'amuser ensemble dans la cour.
Découvrez les projets des étudiants
Le shaputuan (tente conique) en bois de l'école primaire Johnny Pilot à Uashat, sur lequel se tiennent les étudiants de l'Université Laval et de l'Université Laurentienne.
Photo : André Casault