Les vaches sont sensibles à la chaleur et à l’humidité au point où la composition de leur lait peut en subir les contrecoups. En effet, un ou deux jours de stress thermique suffisent pour diminuer le pourcentage de gras et de protéines dans leur lait. C’est ce que démontre une étude que l’étudiante-chercheuse Véronique Ouellet et la professeure Édith Charbonneau, du Département des sciences animales, viennent de publier dans le Journal of Dairy Science.
Les deux chercheuses ont étudié l’effet du stress de chaleur sur la production laitière de 34 600 vaches de la Montérégie et du Bas-Saint-Laurent. Pour y arriver, elles ont utilisé, d’une part, les résultats des analyses de 606 000 échantillons de lait produits par ces vaches sur une période de six ans. D’autre part, elles ont établi le nombre de jours consécutifs, pendant la période précédant la récolte de chaque échantillon, où l’indice de température-humidité était susceptible de provoquer un stress de chaleur chez ces vaches.
«Cet indice est le pendant animal du facteur humidex chez l’humain», explique Véronique Ouellet. Les températures n’ont pas à atteindre des valeurs caniculaires pour affecter les vaches. Un mercure de 21 degrés Celsius combiné à une humidité relative de 25 % suffit pour dépasser leur seuil de tolérance. Les analyses des chercheuses montrent que les jours avec un indice de température-humidité suffisant pour provoquer un stress de chaleur chez la vache sont fréquents au Québec. La moyenne annuelle se chiffre à 136 en Montérégie et à 95 dans le Bas-Saint-Laurent.
L’une des principales réactions des vaches à ce stress est une perte d’appétit. La quantité de lait produit par les vaches n’est toutefois pas affectée par la durée de la période avec stress de chaleur. Par contre, deux jours consécutifs de stress thermique entraînent une baisse de la teneur en gras et en protéines dans le lait. Lorsque cette période atteint 7 ou 8 jours consécutifs, la baisse est de l’ordre de 6 % pour le gras et de 4 % pour les protéines.
Ces diminutions ont des répercussions notables sur les revenus des producteurs laitiers. En effet, au Canada, la valeur du lait est établie en fonction de sa composition, principalement de sa teneur en gras et en protéines. «Les baisses que nous avons observées peuvent se traduire par des pertes annuelles moyennes de 4 700 $ pour un producteur du Bas-Saint-Laurent et de 7 900 $ pour un producteur de la Montérégie», signale Véronique Ouellet. Transposées à l'ensemble des 11 000 producteurs de lait du Québec, ces pertes atteignent plusieurs dizaines de millions de dollars par année. «Ces estimations sont faites à partir des conditions actuelles, poursuit-elle. Les pertes pourraient augmenter sensiblement en raison des hausses de température prévues par les modèles de changement climatique.»
Pour atténuer ces pertes, les producteurs laitiers peuvent recourir à différentes stratégies, signale la chercheuse qui est maintenant postdoctorante à l’Université de la Floride. Les solutions qui semblent les mieux adaptées au contexte québécois reposent sur la ventilation des étables, la recirculation de l’air et les systèmes permettant d'asperger les animaux. Il est aussi possible de modifier le régime alimentaire des vaches de façon à diminuer la production de chaleur causée par la digestion et à stimuler leur appétit. La professeure Charbonneau et son équipe ont entrepris l’évaluation technico-économique de ces stratégies dans deux fermes laitières du Bas-Saint-Laurent et de la Montérégie.
Les autres signataires de l’étude parue dans le Journal of Dairy Science sont Victor Cabrera, de l’Université du Wisconsin-Madison, et Liliana Fadul-Pacheco, du centre d’expertise en production laitière Valacta.