
La dimension de compétition non menaçante du Nutriathlon par équipe favorise l'émulation entre les élèves et le renforcement des comportements. Les jeunes sont encouragés à partager les stratégies qu'ils utilisent pour atteindre leurs objectifs.
Le Nutriathlon s'inspire du Pentathlon par équipe, une autre intervention scolaire créée au Département d'éducation physique, celle-là dans le but de contrer le désengagement de l'activité physique qui survient à la fin du primaire. «Ce programme a donné de très bons résultats dans les écoles où il a été testé et on nous a suggéré de développer une intervention similaire pour améliorer les habitudes alimentaires des jeunes», raconte la professeure Vicky Drapeau. Au Québec, les recommandations touchant la consommation quotidienne de fruits et légumes (5 portions) ne sont atteintes que chez 40% des 9 à 13 ans. Pour les produits laitiers, environ 60% des jeunes consomment les 2 portions recommandées chaque jour.
Les interventions scolaires pour améliorer les choses ont surtout fait appel à l'éducation à la nutrition et aux modifications de l'offre alimentaire dans les cafétérias et les machines distributrices. «Les résultats ont été modestes et de courte durée, rapporte la professeure Drapeau. Nous avons donc tenté une autre approche, qui mise sur le développement des compétences et de l'autonomie des jeunes par rapport à leurs choix alimentaires.»
Le Nutriathlon est une activité ludique comportant un volet individuel et un volet par équipe. Il met les participants au défi d'atteindre des cibles quotidiennes de consommation de fruits et légumes et de produits laitiers qui tiennent compte de la quantité et de la diversité. Les participants doivent noter sur des fiches conçues à cette fin les aliments de chaque catégorie qu'ils consomment. Toutes les deux semaines, les résultats sont compilés et communiqués aux participants au cours d'une rencontre de groupe. «Il y a une certaine compétition, non menaçante, qui favorise l'émulation entre les élèves et le renforcement des comportements, souligne la chercheuse. D'ailleurs, les jeunes sont encouragés à partager les stratégies qu'ils utilisent pour atteindre leurs objectifs. À la fin des huit semaines du programme, les élèves et les équipes qui ont réussi reçoivent des diplômes symboliques.»
Une évaluation du programme menée auprès de 404 élèves de 5e et 6e année du primaire a livré des résultats convaincants. La consommation quotidienne moyenne de fruits et légumes et de produits laitiers était respectivement de 3,1 portions et de 2,0 portions plus élevée chez les participants du Nutriathlon que chez les élèves du groupe témoin. Un suivi effectué 10 semaines après la fin du programme a montré que ces différences s'étaient maintenues. «Le programme est efficace pendant et après l'intervention, du moins à moyen terme», résume Vicky Drapeau.
L'implantation du programme dans une école est moins exigeante qu'on pourrait le croire. Une formation de deux heures suffit pour qu'un enseignant puisse jouer le rôle de coordonnateur. Par la suite, il faut compter environ cinq heures de travail réparties sur huit semaines. Pour simplifier le travail du coordonnateur, l'équipe de chercheurs a conçu une plateforme en ligne qui permet de générer automatiquement les rapports individuels et les rapports d'équipe. «Le Nutriathlon complète bien ce qui se fait déjà en milieu scolaire, estime la professeure Drapeau. Il invite les jeunes à l'action; il les amène à se poser des questions sur leur alimentation et à trouver des stratégies pour surmonter les difficultés. Il ne peut résoudre à lui seul les problèmes de consommation de fruits et légumes chez les jeunes, mais il peut faire partie d'une stratégie globale d'intervention.»
L'équipe du Nutriathlon poursuit ses travaux sur deux fronts. Elle a testé l'intervention auprès d'élèves du secondaire et les résultats devraient être annoncés plus tard cette année. De plus, elle a développé une version familiale du programme. «Nous la mettons à l'essai dans les familles où il y a un enfant avec un ùsurplus de poids, de sorte que le jeune ne se sente pas ciblé directement, explique la chercheuse. Les résultats préliminaires sont prometteurs. Nous recrutons encore des familles pour ce projet.»
L'étude publiée dans le Journal of School Health est signée par Vicky Drapeau, Mathieu Savard, Annette Gallant, Luc Nadeau et Jocelyn Gagnon, du Département d'éducation physique.