La maladie de Huntington est un trouble neurodégénératif d'origine génétique qui provoque des mouvements involontaires ainsi que des troubles cognitifs et psychiatriques allant jusqu'à la perte d'autonomie et à la mort. Elle est causée par une mutation dans le gène de la huntingtine, une protéine qui joue un rôle dans la régulation de plusieurs fonctions cellulaires. La protéine défectueuse forme des agrégats qui conduiraient à la dégénérescence des neurones.
L'équipe de Francesca Cicchetti a examiné le cerveau de trois personnes atteintes de Huntington, décédées des suites de leur maladie. Ces patients avaient subi une greffe de cellules foetales neuronales dix ans plus tôt. Les analyses ont révélé que la matrice extracellulaire des tissus greffés contenait de la huntingtine mutée. L'hypothèse la plus probable est que cette protéine s'est diffusée dans le cerveau ou qu'elle a été transportée à partir des cellules adjacentes de l'hôte vers le tissu greffé, avance la professeure Cicchetti.
«C'est la première fois que la huntingtine mutée est observée dans des tissus greffés, signale la chercheuse. Dans ce type de maladies génétiques, on a toujours cru que le problème provenait d'un phénomène intrinsèque aux cellules, soit l'expression d'un gène anormal. Ici, nous démontrons que la protéine mutée se disperse dans la matrice extracellulaire du cerveau. Cette découverte change notre compréhension de cette pathologie et des autres maladies neurodégénératives similaires comme l'alzheimer et le parkinson.»
Cette dispersion des protéines mutées refroidit les espoirs placés dans les greffes neuronales. «Je crois de moins en moins à cette avenue pour traiter les personnes atteintes de Huntington, admet la chercheuse. Pour espérer obtenir des résultats, il faudrait procéder à la greffe à un stade très précoce de la maladie, avant qu'une trop grande partie du cerveau soit touchée. Même dans ce contexte, nos résultats suggèrent que les cellules greffées ne seront pas épargnées par la pathologie.»
D'autres avenues de traitement s'annoncent plus porteuses, estime-t-elle. «Le plus souvent, la maladie commence à s'exprimer après la quarantaine. Elle résulte d'un cumul de dommages qui s'étalent sur de nombreuses années. Il faut trouver pourquoi le corps ne parvient plus à contenir les dommages causés par la huntingtine mutée. Les mécanismes de transport et d'élimination de cette protéine peuvent être en cause. Si on les connaissait, on pourrait cibler ces systèmes pour ralentir ou même arrêter la progression de la maladie.»
L'étude parue dans Annals of Neurology est également signée par Steve Lacroix, Giulia Cisbani, Nicolas Vallières, Martine Saint-Pierre, Isabelle St-Amour, Ranna Tolouei, Diego Mantovani, de l'Université Laval, Jeremy M. Skepper et Roger Barker, de l'Université de Cambridge, et Robert Hauser et Thomas B. Freeman, de l'Université de South Florida.