«La bourse de 3 000$ octroyée par l'organisme a permis à deux assistantes de recherche, Camille Pepin et Laura-Émilie Savage, de se rendre sur place trois mois après les événements, explique la professeure. Les résultats des questionnaires et des entrevues réalisés en juillet ne sont pas encore publiés, mais nous avons déjà transmis les grandes lignes de cette étude aux participants.» L'équipe de recherche a collecté 379 questionnaires et a effectué 55 entrevues avec des résidents qui avaient quitté précipitamment la ville pour fuir l'incendie.
À sa grande surprise, Geneviève Belleville a découvert que 60% des personnes ayant répondu aux questions en ligne souffraient de divers problèmes, même trois mois après les événements. Il pouvait s'agir de souvenirs dérangeants liés à l'évacuation ou à l'incendie ou de sérieuses difficultés liées au sommeil. Or, ce genre de symptômes, conjugués à un stress intense, constituent un risque important pour certaines personnes de développer une dépression, mais aussi de l'anxiété et le trouble de stress post-traumatique. Il faut dire que l'incendie de Fort McMurray constitue un cocktail explosif réunissant plusieurs ingrédients traumatiques. Le feu a ravagé la ville en un temps record, obligeant de nombreux résidents à fuir les lieux extrêmement rapidement, alors que les flammes dévoraient les bas-côtés de la route. Beaucoup ignoraient si leurs proches avaient réussi à échapper aux flammes. Des parents ont mis plusieurs heures, par exemple, à retrouver leurs enfants, évacués par le personnel enseignant.
Au fil de leurs recherches, les deux étudiantes au doctorat en psychologie, mandatées par Geneviève Belleville, ont également effectué des entrevues cliniques – des entrevues menées soit avec des personnes qui avaient déjà répondu au questionnaire, soit avec d'autres victimes de l'incendie. Pour les trouver, elles ont sillonné la ville de Fort McMurray, visitant les centres commerciaux, les stationnements de postes d'essence et les centres communautaires. Parmi les 55 citoyens rencontrés, près de 29% souffraient de symptômes de stress post-traumatique, tandis que 26% avaient des symptômes de dépression.
Selon Geneviève Belleville, il s'agit de réactions normales à un événement extrêmement anormal. À l'entendre, l'état de santé psychologique d'une majorité de ces personnes devrait graduellement s'améliorer avec le temps. Elle pourra d'ailleurs suivre l'évolution du moral de la population puisqu'elle participe à une étude approfondie sur les citoyens de Fort McMurray. Les Instituts de recherche en santé du Canada vont en effet financer un projet visant à mieux comprendre la façon dont le syndrome de stress post-traumatique prend de l'ampleur ou diminue chez certaines personnes. Ce projet, qui démarre tout juste, s'intéressera notamment aux moyens qu'il faudrait utiliser pour améliorer la résilience des citoyens. Il associe l'expertise de la professeure à celle de chercheurs des universités de Calgary et de l'Alberta.