Cet «âge d’or» du parlementarisme québécois constitue une des trois idées maîtresses qui traversent le livre Le Parlement du Québec de 1867 à aujourd’hui, un ouvrage de près de 300 pages écrit par le professeur Massicotte. Le mercredi 20 mai, les Presses de l’Université Laval ont fait le lancement du livre à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale à Québec. Selon l’auteur, ce n’est qu’à partir de 1936, avec l’élection du premier gouvernement unioniste dirigé par Maurice Duplessis, que les choses ont commencé à changer. «C’est, dit-il, une année charnière. Le régime de dissidence parlementaire et l’indépendance du simple député prennent fin à ce moment-là. Duplessis expulse les dissidents un à un de son parti. Aujourd’hui, la députation est solidement encadrée, et il est très rare qu’un simple député dépose un projet de loi.»
Louis Massicotte: «On ne devrait pas s’étonner du fait que le Parlement du Québec, depuis 1867, ait eu la volonté de québéciser le modèle initial du parlementarisme britannique, car la monarchie est moins importante au Québec qu’à l’extérieur».
Réformer la procédure
L’an 1960 et le début de la Révolution tranquille constituent un autre moment charnière dans l’histoire du Parlement du Québec. «On assiste alors au début des changements de la procédure qui vont aboutir à la plus importante réforme des méthodes de travail à l’Assemblée, raconte Louis Massicotte. Nous vivons encore largement sous cette réforme.» Jusque-là, un immobilisme relatif caractérisait le cadre constitutionnel, législatif et procédural, ainsi que le régime des sessions et des méthodes de travail. «Cela dit, souligne le professeur Massicotte, j’ai été frappé, dans ma recherche, qu’il n’y ait pas eu de changement majeur au cours de cette période. Les réformes se sont avérées nécessaires, mais pas très originales.» Une réforme originale, soit l’ajournement des sessions parlementaires à date fixe, ne surviendra qu’à la fin des années 1970. «Ce fut une très bonne idée du ministre péquiste Robert Burns», soutient-il.
Dans son livre, Louis Massicotte explique que le Parlement du Québec ne s’est pas distingué de façon appréciable des autres parlements du Canada, ni dans son évolution ni par ses réformes. «Sauf sur le plan identitaire, précise-t-il. Le Parlement a notamment réduit la visibilité de la monarchie britannique afin de répondre aux exigences d’une société majoritairement de langue française.»
Le Parlement du Québec de 1867 à aujourd’hui fait revivre une époque où la députation a été pendant longtemps exclusivement masculine. En comparaison, 38 femmes sont devenues députées en 2003. «Une nouvelle règle va très loin, ajoute le professeur Massicotte. Depuis 2007, il y a parité des sexes au Conseil des ministres. Le Québec est à l’avant-garde à ce chapitre en Amérique du Nord.»
De 1901 à 1940, 15,3 % des députés ont été élus sans concurrent lors d’élections générales. L’âge moyen des députés était de 41,7 ans en 1867 et de 52,4 ans en 1956. De 1867 à 1960, au moins les trois quarts d’entre eux étaient constitués de professionnels et de gens d’affaires. «Ces gens reflétaient une élite, indique Louis Massicotte. Avant les années 1960, ils étaient beaucoup plus instruits que la moyenne.» Quant aux députés anglophones, ils ont vu leur nombre diminuer sans cesse. Ils représentaient 30 % de la députation en 1867 et 10 % après 1945.