Chargée d’enseignement en création littéraire à l’Université Laval, Anne Peyrouse ne manque pas de projets chez Hamac ces temps-ci. Après avoir lancé plusieurs titres, dont son recueil de nouvelles encore temps de rebrousser chemin, elle travaille sur la création d’une collection consacrée à la poésie. Cet hiver, quatre premiers recueils paraîtront, deux d’auteurs de la relève et deux autres de poètes établis.
Anne Peyrouse est directrice littéraire de Hamac depuis un peu plus d’un an. Elle s’est jointe à l’équipe quand la maison d’édition a été vendue par Septentrion aux Productions Somme toute. Elle connaît bien la direction littéraire pour avoir occupé ce poste chez Le Loup de Gouttière et Cornac. «Quand on m’a proposé de rejoindre Hamac, j’ai sauté sur l’offre. J’ai vu l’occasion de renouer avec ma passion de travailler avec les autrices et les auteurs», dit-elle.
Sa priorité est de publier des textes qui ont un style narratif fort. «Ce que je vise, c’est la qualité littéraire. Je n’ai pas de perception comme telle par rapport aux œuvres que je reçois, qu’il s’agisse de romans policiers, d’autofiction ou de textes humoristiques. La tonalité et le travail sur le langage font partie des éléments qui font que j’embarque dans le texte après avoir lu une dizaine de pages.»
Parmi les œuvres qui ont capté son attention récemment figure un roman écrit par un collègue de l’Université, Alain Beaulieu. Novembre avant la fin est l’histoire d’un écrivain décédé qui vient hanter les séances d’écriture de sa petite-fille. Un peu comme s’il lisait par-dessus son épaule, il lui prodigue conseils et encouragements pour l’aider à avancer son premier roman. Le tout se fait avec humour, empathie et un brin d’autodérision.
Anne Peyrouse a été interpellée par ce croisement entre fiction et essai sur la création littéraire. «Le fait que ce soit un auteur décédé qui rend visite à une écrivaine de la relève, je trouvais cela très intéressant. En plus des conseils importants que ce personnage donne sur le travail d’écriture, l’histoire est touchante, jolie et agréable à lire. Alain a su marier la fiction et les réflexions de grands auteurs qui se sont penchés sur l’art d’écrire.»
Le nouveau recueil d’Anne Peyrouse, encore temps de rebrousser chemin, est marqué également par cette hybridation des genres. D’une nouvelle à l’autre, fiction, autofiction, autobiographie et conte s’entremêlent sans que le lecteur puisse réellement faire la distinction. Anne Peyrouse prend un plaisir évident à créer la confusion. Elle explore aussi le contraste entre les majuscules, les mots en italique, les caractères gras et les notes de bas de page. «J’aime beaucoup la nouvelle, car elle me permet de travailler des textes différents sur les plans du langage et de l’imaginaire. Étant poète, je m’amuse aussi avec la présentation physique du mot sur la page.»
Quant au titre du recueil, encore temps de rebrousser chemin fait référence aux différents fils narratifs qui tissent les récits. «Dans ce recueil, des destins se jouent. Le titre s’ancre bien dans la réalité des personnages. Chacun pourrait aller ailleurs à un moment ou un autre de sa vie. Ces personnages pourraient rebrousser le chemin et donc amener le lecteur complètement ailleurs.»
Le titre a aussi une connotation bien personnelle pour l’auteure. «Moi-même, j’aurais pu rebrousser chemin et décider de ne pas être écrivaine, que ce soit parce que c’est un métier trop difficile ou parce que mon père refusait que je m’inscrive en littérature au cégep. Ce genre de barrières aurait pu faire en sorte que je rebrousse chemin.»
Ce qui l’incite à continuer à écrire? «Je ne sais pas ce que je ferais d’autre, répond-elle en riant. J’adore la littérature. Depuis l’âge de 11 ans, je baigne dans cet univers. Ma maison est pleine de livres. Je lis tout, que ce soit de l’essai, du théâtre, du roman, de la poésie. Sans la lecture et l’écriture, je serais bien triste.»
Tout comme ses lecteurs.