
Le Canada produit environ 80 000 tonnes métriques de citrouilles par année. La plupart de ces citrouilles servent de décorations à l'Halloween.
— Getty Images/Castort
Les millions de citrouilles dont il faut disposer au lendemain de l'Halloween pourraient avoir une deuxième vie utile pour l'environnement. En effet, une étude publiée par une équipe de l'Université Laval dans l'International Journal of Environmental Science and Technology suggère que la pelure de citrouille – tout comme celle de trois autres fruits – pourrait rendre de précieux services environnementaux grâce à sa capacité de capter des métaux lourds comme le plomb.
Cette démonstration a été faite par l'équipe de Seddik Khalloufi, professeur au Département des sols et de génie alimentaire et chercheur à l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels de l'Université Laval. «Les techniques existantes pour enlever les métaux lourds des eaux usées ou des sols sont coûteuses et elles exigent souvent un personnel qualifié. Il y a une demande pour des techniques plus efficaces et plus économiques», constate le professeur Khalloufi.
Au départ, l'objectif des travaux de son équipe était de trouver, dans les rejets végétaux générés par l'industrie alimentaire, des ingrédients actifs ayant des propriétés fonctionnelles, pour la santé par exemple. «L'idée est d'ajouter ces ingrédients actifs à des aliments comme les yogourts ou certaines boissons, précise le professeur. En cours de route, nous avons constaté, un peu par accident, que certaines pelures de fruits parvenaient à adsorber des métaux lourds comme le plomb.»
L'équipe du professeur Khalloufi s'est intéressée à trois fruits dont la peau non comestible représente un pourcentage élevé de leur poids. Il s'agit du melon d'eau (30%), de la banane (38%) et du melon jaune (56%). «Nous avons aussi ajouté la citrouille parce que nous tenions à avoir un fruit cultivé en abondance au Québec. Sa pelure ne représente que 7% de son poids, mais vu le nombre de citrouilles qui sont jetées après l'Halloween, ça représente une biomasse considérable», souligne le chercheur.
Pour évaluer la capacité de captation du plomb par ces fruits, les chercheurs ont d'abord transformé leur pelure en poudre. Ils ont ensuite placé chacune de ces poudres dans des solutions contenant une concentration connue de plomb. «Après 5 minutes de contact, les poudres de chacun de ces fruits avaient adsorbé 99% du plomb présent dans l'eau», résume le professeur Khalloufi.
Vu leur haute efficacité, ces poudres pourraient être utilisées pour fabriquer des biofiltres servant à retirer le plomb et probablement d'autres métaux lourds, des eaux usées ou des eaux contaminées par des déversements dans l'environnement. «Les métaux lourds captés par ces biofiltres pourraient être récupérés et utilisés dans des procédés industriels», souligne-t-il.
Les métaux lourds ne seraient peut-être pas les seuls composés problématiques qui pourraient être captés par ces poudres, poursuit le chercheur. «Nous projetons d'en évaluer l'efficacité avec les pesticides, les antibiotiques et les hormones.»
«Nos résultats montrent non seulement que ces déchets végétaux peuvent être valorisés, mais qu'ils sont suffisamment efficaces pour qu'on envisage la possibilité qu'ils remplacent les adsorbants synthétiques conventionnels, croit-il. Il reste, évidemment, à faire la mise à l'échelle industrielle de procédés recourant à ces poudres et à démontrer leur viabilité économique.»
Grâce à une subvention du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, l'équipe du professeur Khalloufi entend maintenant étudier l'efficacité des restes de petits fruits indigènes du Québec générés par l'industrie alimentaire pour adsorber et éliminer les métaux lourds des eaux contaminées.
Les signataires de l'étude parue dans l'International Journal of Environmental Science and Technology sont Zarifeh Raji, Robercia Maleka, Ahasanul Karim, Antoine Karam, Mohammed Aider et Seddik Khalloufi.

























