8 mai 2025
La Galerie des arts visuels envahie par l’eau
L’artiste et professeure Marie-Christiane Mathieu s’est inspirée de divers enjeux liés aux zones inondables pour créer l’exposition Quand les flots bleus de la rivière et la pluie de la haute-ville atteindront la galerie. Essai sur les DÉBORDEMENTs.

Image tirée de la réalité virtuelle de l'exposition Quand les flots bleus de la rivière et la pluie de la haute-ville atteindront la galerie. Essai sur les DÉBORDEMENTs.
Qu'arriverait-il si la Galerie des arts visuels, située dans le demi-sous-sol de l'édifice La Fabrique dans le quartier Saint-Roch, était inondée? Vous le saurez si vous visitez l'exposition qui y est actuellement présentée. Dans cette exposition de réalité étendue, l'artiste Marie-Christiane Mathieu, professeure à l'École d'art, vous invite à vous coiffer d'un casque de réalité virtuelle et à expérimenter une inondation.
«Depuis 2020, je travaille sur le projet Nous sommes tous des astronautes: scénarios et prototypes pour des temps extrêmes, dont l'un des axes s'articule autour des changements climatiques et de la montée des eaux. En 2021, peu après le passage de l'ouragan Ida, j'ai décidé d'aller faire des recherches sur le terrain en Louisiane. Sur la route, j'ai pris des photos qui documentent surtout la transformation de mes émotions, de ce que j'ai ressenti devant ce que l'ouragan a laissé. Je me suis alors demandé comment traiter le sujet de l'inondation par l'art. J'aurais pu choisir de le traiter avec des photos ou une vidéo, mais ça ne me semblait pas suffisant… Je voulais faire vivre l'inondation», raconte Marie-Christiane Mathieu.
L'exposition «matérielle» propose des photos prises après le passage de l'ouragan Ida.
— Yan Doublet
Les photos prises lors de la descente vers le golfe du Mexique sont finalement exposées à la Galerie des arts visuels, mais elles ne sont qu'un rappel des origines du projet. L'élément essentiel de l'exposition Quand les flots bleus de la rivière et la pluie de la haute-ville atteindront la galerie. Essai sur les DÉBORDEMENTs est l'ombre numérique de la galerie, c'est-à-dire la réplique numérique du lieu dans laquelle on a pu créer une inondation. «Il s'agit vraiment d'une réplique parfaite du bâtiment. Si vous voyez une colonne et que vous avancez la main pour la toucher, vous toucherez à la colonne réelle», explique l'artiste.
En plus des photos, l'exposition «matérielle» compte une sculpture qui se gonfle comme un poumon. «C'est une composante intéressante par le son qu'elle produit parce que, dans une inondation, on va rapidement utiliser des pompes et on voulait que ce bruit soit présent», indique la professeure Mathieu, qui a été épaulée dans ce projet par deux étudiants-chercheurs, Jonathan Cantin-Demers et Vincent Isabel.
— Marie-Christiane Mathieu
Pour réfléchir aux possibilités réelles d'inondation de la Galerie, Marie-Christiane Mathieu a étudié plusieurs données scientifiques, dont les cartes des zones inondables créées par le gouvernement du Québec. Elle a également discuté avec deux chercheurs de l'École supérieure d'aménagement du territoire et de développement régional. «L'un d'eux m'a dit de ne pas trop alarmer les gens avec la possibilité d'une inondation. En fait, il y a un bon dénivelé entre le boulevard Charest et la rivière Saint-Charles, ce qui réduit les risques d'inondation. La seule possibilité, ce serait qu'il y ait des pluies très, très, très abondantes, et encore là, la Ville de Québec a récemment élargi un canal pour accueillir toutes les eaux pluviales. Selon les données scientifiques, la Galerie est à l'abri des inondations jusqu'en 2125», remarque l'artiste, qui admet que ça n'empêche pas qu'on puisse imaginer, au nom de l'art, un futur possible.
L'exposition est présentée jusqu'au 25 mai à la Galerie des arts visuels.

Une sculpture, qui se gonfle comme un poumon, permet de reproduire le bruit des pompes mises en place lors d'inondations.
— Yan Doublet