Plus de 250 experts de 39 pays, dont une majorité d'agriculteurs, ont échangé lors du Colloque international «Agriculture, biodiversité et sécurité alimentaire: des engagements aux actions», qui s’est tenu au Centre des congrès de Québec du 30 avril au 2 mai 2024. L’événement s'est clôturé par la livraison d'une feuille de route technique, mettant en lumière des constats et des recommandations pour intégrer des bonnes pratiques dans le secteur agricole.
Impliquer les agriculteurs
C'est lors de la COP15 que l'idée de tenir un colloque est venue aux organisateurs, soit l'École supérieure d'études internationales (ESEI) de l'Université Laval, le ministère des Relations internationales et de la Francophonie (MRIF) l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique.
«On a constaté qu'il y avait peu d'agriculteurs présents, alors que la plupart des cibles discutées touchaient l'agriculture. Ils n'étaient pas consultés. On s'est dit qu'on devait les impliquer davantage», souligne Geneviève Parent, professeure à la Faculté de droit de l'Université Laval et coprésidente du colloque.
Le Colloque a donc permis de leur donner une voix au sein des réflexions à l'international en matière de biodiversité. «On voulait faire parler le terrain, les gens qui sont dans les champs, avec les décideurs et les penseurs de l'élaboration de ces cibles. Ce sont deux mondes éloignés», ajoute la coprésidente.
Elle se réjouit de la grande participation des agriculteurs, qui représentaient plus de 30% de l'assistance, ajoutant qu'ils étaient reconnaissants de l'invitation. Elle souligne que les organisations présentes étaient heureuses de discuter de la réalité de ces acteurs. «L'agriculteur a besoin de la diversité biologique, et la diversité biologique a besoin de l'agriculteur.»
Trois visées principales
La feuille de route avait trois grandes visées. La première était de mettre en valeur les bonnes pratiques que le secteur agricole met déjà en œuvre. «Ces pratiques sont peu connues. Souvent, l'agriculture est perçue dans le milieu de l'environnement comme étant une activité polluante, rapporte Geneviève Parent. On voulait la replacer au cœur de la protection et de la gestion de la biodiversité, car les agriculteurs sont les premiers gardiens de cette agrobiodiversité. S'ils ne la cultivent ou ne l'élèvent pas, elle disparait. Ils ont un rôle central à jouer.»
Le deuxième point abordait les défis rencontrés pour aller plus loin dans la mise en place des bonnes pratiques. «Les plus fréquemment cités étaient les ressources financières pour opérer ces changements, la formation et le transfert de connaissance et le défi de la protection des terres agricoles», précise la professeure.
Le troisième objectif était de déterminer des pistes de solutions en lien avec les outils ou les politiques nécessaires.
C'est «mission accomplie» pour l'ESEI, indique Geneviève Parent. «L'objectif de l'École et du Carrefour international Brian-Mulroney est que l'Université Laval devienne un lieu de convergence, qui rend possible ce genre d'échanges interdisciplinaires et internationaux. Cet événement représente bien ce pour quoi l'École a reçu un appui important du ministère des Relations internationales et de la Francophonie, de tenir des rencontres d'envergures avec des organisations internationales.»
Un travail en amont
La feuille de route a fait l'objet de plusieurs consultations en amont du colloque. Une première étape était de récolter des recommandations à travers le Forum Food security network (FSN) sous la responsabilité de la FAO. «Nous avons reçu des contributions de 67 pays. La consultation est la deuxième à avoir reçu le plus de contributions dans l'histoire du Forum-FSN. Nous avons reçu des réponses riches de parties prenantes variées, dont des agriculteurs.»
Une deuxième consultation a été menée auprès des participants du forum agroenvironnemental de l'Union des producteurs agricoles tenu en février. Puis, la feuille de route a été bonifiée par tous les échanges lors du colloque pour finalement la livrer à la fin de l'événement.
Geneviève Parent espère que ce document permettra de poursuivre les discussions avec les agriculteurs sur le plan international et national, notamment lors de la COP16, et de bonifier les bonnes pratiques que le secteur agricole met déjà en œuvre. Ibrahima Coulibaly, président de la Plateforme panafricaine des organisations paysannes et coprésident du colloque, à l'instar de plusieurs représentants agricoles, s'est engagé à mettre de l'avant cette feuille de route dans son réseau.