Une suite orchestrale de danses inspirées du tango, de la bossa-nova et d’autres rythmes modernes, donc bien loin de la sarabande, du menuet et autres danses classiques, voilà la proposition musicale nouveau genre que le pianiste et compositeur de musique classique Marc-André Pépin, également analyste en informatique retraité de l’Université Laval, offre aux mélomanes depuis le mois de mars.
«Cet album intitulé Arômes de jazz – suite symphonique a été enregistré avec le Budapest Scoring Orchestra, écrit-il sur sa page Facebook. Contrairement à mes autres disques, qui étaient pour l’essentiel des albums pour piano, celui-ci a été composé entièrement pour un orchestre symphonique sans l’utilisation du piano, ou presque.»
Selon lui, il y a du rythme, mais c’est très classique. «Le jazz est là derrière, dit-il, mais il ne domine pas.»
Cette suite orchestrale comprend neuf pièces aux titres évocateurs comme Quand le chant n’est pas là, Farniente et Carrousel. L’opus est disponible sur tous les sites d’écoute. Sur la page Spotify du compositeur, le disque a attiré autour de 6000 mélomanes. La maison de disque est la propre compagnie du compositeur, les Productions Emma-P.
Jusque-là, Marc-André Pépin n’avait fait des arrangements que pour de petits ensembles. Malgré cela, et en plus de s’aventurer dans ce style musical particulier qu’est le jazz, l’écriture des pièces s’est bien déroulée. «Un magnifique voyage», dira-t-il en entrevue, précisant avoir écouté beaucoup de musique classique dans sa vie ainsi que beaucoup de jazz. «Écouter du jazz, explique-t-il, c’est comme lorsqu’on arrive dans un pays dont on ne comprend pas la langue. Si on reste suffisamment longtemps, notre cerveau s’habitue et les mots finissent par nous dire quelque chose. Les sons également.»
La production du disque, elle, a comporté sa part de difficultés. Le compositeur a travaillé avec un orchestre établi à des milliers de kilomètres de Québec, en Hongrie. Les deux parties communiquaient par Zoom. Pour la réalisation de l’album, Marc-André Pépin s’est adjoint le professeur et musicologue Serge Lacasse, de la Faculté de musique de l’Université Laval.
Selon le compositeur, «deux paires d’oreilles n’étaient pas de trop».
«L’orchestre a développé une forme de service clé en main pour l’enregistrement de pièces musicales, indique-t-il. Il est composé d’excellents musiciens. Après chaque exécution d’une pièce, Serge et moi faisions à distance des remarques, habituellement pour ajuster des nuances, des articulations ou pour accentuer certaines notes. C’étaient des remarques faites afin d’obtenir la meilleure interprétation possible. Les musiciens s’ajustaient vite.»
À la fin du processus, les responsables de l’orchestre ont fait parvenir les enregistrements à Marc-André Pépin et à Serge Lacasse. Il ne restait plus à ce dernier qu’à effectuer les étapes du mixage et du mastering. Le compositeur dit devoir une fière chandelle au professeur pour son travail patient et attentif. «Il a un très bon jugement et il a fait un très beau travail, soutient-il. Le projet en fut un d’envergure et je suis très satisfait du résultat.»
Deux disques en nomination au gala de l’ADISQ
Marc-André Pépin a lancé son premier album, intitulé Chansons sans paroles, en 2008. Trois ans plus tard, son deuxième opus, Rendez-vous, s’est retrouvé en nomination au gala de l’ADISQ dans la catégorie Album instrumental de l’année. Même scénario en 2018 pour son quatrième disque, Tempus Fugit.
«Pour mon style de musique, je dirais qu’il est classique ou néo-classique, précise-t-il. C’est une musique de conception classique dans la façon d’exprimer et de développer des idées musicales.»
Le parcours artistique de Marc-André Pépin a ceci de particulier qu’il s’est déroulé en parallèle avec la profession d’analyste en informatique à la Direction des technologies de l’information de l’Université Laval. Il est maintenant à la retraite. «Mes deux carrières ont toujours été présentes, souligne-t-il. Je suis titulaire d'un baccalauréat en génie électrique de l’Université Laval, où j’ai aussi suivi un cours de composition. J’ai également obtenu un baccalauréat en musique de l’Université de Montréal. Mes deux emplois m’ont demandé beaucoup de discipline. Il y avait toujours des périodes réservées à la musique, que ce soit le soir, sur semaine, ou pendant la fin de semaine. Le matin, avant de partir travailler, je me levais de bonne heure et je consacrais habituellement une heure à la pratique du piano. Je n’ai jamais considéré le piano comme un passe-temps.»
Y a-t-il un lien entre musique et science informatique? «C’est une question à développement! répond-il. Je vais essayer de faire court. Pour moi, il n’y a pas vraiment de lien. On parle plus souvent du lien entre musique et mathématique, mais dans ce cas-là non plus, je ne vois pas de liens. En fait, il y a peut-être une qualité qui doit être commune à ceux qui pratiquent dans ces différents univers et c’est la rigueur. Pour le reste, j’ai l’impression que mon cerveau travaille de façon bien différente quand je fais de la musique que lorsque je fais des mathématiques ou de l’informatique.»
Jouer à l’oreille dès huit ans
Les premiers contacts de Marc-André Pépin avec la musique remontent à son enfance à Saint-Benjamin, en Chaudière-Appalaches. «On avait un piano à la maison et je trouvais que les sons étaient beaux, raconte-t-il. J’étais attiré par le son. À huit ans, je jouais à l’oreille. J’essayais de reproduire les chansons que j’entendais à la radio.»
Dans la maison familiale la musique classique n’occupait qu’une place relative. Il n’empêche que des valses de Chopin et de Strauss ainsi que des concertos de Mozart jouaient sur la table tournante. «J’ai usé ces albums tellement je les ai fait jouer, explique-t-il. Aussitôt que j’ai eu de l’argent de poche, j’ai acheté des disques. Je me suis aussi intéressé au rock progressif. Ces gens avaient une formation classique. Ils s’inspiraient souvent de musique classique, ce qui me plaisait beaucoup.»
Le père de famille chantait à l’église du village et jouait du piano à l’oreille. La sœur du jeune Marc-André ayant commencé des cours de piano, celui-ci a aussi voulu suivre un cours, donné par l’organiste de la paroisse. «J’ai commencé à écrire de la musique à l’adolescence, poursuit-il. J’avais de bonnes idées musicales, mais cela a pris un certain temps avant d’être capable de bien les développer. Les transitions étaient abruptes. Composer une pièce, cela suppose non seulement de l’harmonie mais aussi de la cohérence, musicalement parlant. Cela prend du métier, même pour une pièce de trois ou quatre minutes avec un début, un développement et une fin. Il faut que tout se tienne.»
Loin de s’arrêter, Marc-André Pépin vient de terminer l’écriture d’un ballet pour musique symphonique. «J’ai toujours adoré Casse-Noisette, dit-il, et le mien est dans le même esprit de divertissement familial. Mais produire un ballet est toute une entreprise. Ce ne sera pas un projet facile.»
Faire l’écoute du disque Arômes de jazz – suite symphonique