Compenser la monotonie du confinement hivernal 2021 par une explosion de couleurs. Voilà ce qui a guidé le travail derrière le court-métrage bien nommé Pop Cycle. Un titre clin d'œil à la friandise givrée et colorée qui fait du bien. «Ce film-là, c'est comme un bonbon visuel», résume la coréalisatrice Anne-Sophie Gravel.
L'envie de «contrer ses émotions, de battre le feu par le feu, de créer quelque chose de joyeux et de rythmé», comme le décrit son collègue John Harbour, a été un pari réussi. Sélectionné aux Sommets du cinéma d'animation de Montréal, le film d'environ deux minutes sera projeté à la Cinémathèque québécoise les 13 et 14 mai dans la catégorie «Grand Angle», une section non compétitive consacrée aux découvertes, à l'exploration et à l'audace.
Pour le duo de doctorants en littérature et arts de la scène et de l'écran à l'Université Laval, il s'agit d'«une consécration» et d'«une immense joie», puisque Pop Cycle est leur premier film professionnel et indépendant. Il s'insère parmi une programmation composée de 114 films, dont 37 courts-métrages provenant de partout au pays. Un autre film sélectionné, Les Charmes d'Ys, a été réalisé l'an dernier par une étudiante au baccalauréat en art et science de l'animation à l'Université Laval, Catherine Raymond.
Le parcours de Pop Cycle débutera pour sa part le 10 mai, alors qu'il sera projeté au Festival international de cinéma d'animation de Meknès, au Maroc.
Dessin sur pellicule
À travers ce projet, John Harbour a voulu expérimenter une technique qu'il n'avait jamais utilisée, celle du dessin sur pellicule. Il avait en tête des inspirations comme Caprice en couleurs, une animation signée Norman McLaren et Evelyn Lambart, Casino de Steven Woloshen ou Le long cri du train se glisse au cœur des spectres et tout explose en silence de la cinéaste de Québec Anne-Marie Bouchard.
— John Harbour, coréalisateur, en parlant du dessin sur pellicule
«Traditionnellement, cette technique est beaucoup associée à la musique, parce qu'elle permet de rythmer l'animation ou de la compléter», explique le coréalisateur. Ses 2000 dessins réalisés au feutre prennent vie sur des sonorités électroniques pop rappelant celles en vogue dans les années 1980. Anne-Sophie Gravel a magnifié les couleurs et imaginé le concept musical, tout en s'inspirant d'albums punk comme ceux des Sex Pistols pour faire le titrage du film. Le compositeur Martin Gravel a pris la balle au bond et créé une trame sonore à l'avenant, qui se synchronise aux images.
Les trois coéquipiers avaient déjà travaillé ensemble, notamment sur Mal de chien en 2019, un film qui a rayonné dans les festivals l'année suivante. «C'est une récidive. Il y a vraiment une saine collaboration», indique Anne-Sophie Gravel.
Elle-même a eu carte blanche pour réaliser les séquences de prises de vues réelles qui encadrent l'animation au début et à la fin. Cette partie très expérimentale, où John Harbour apparaît et dessine sur pellicule, se veut un hommage aux premiers films d'animation, où l'on montrait le cinéaste ou le dessinateur en train de créer.
Cinéaste en résidence
Fruit du hasard, John Harbour est cinéaste en résidence à la Cinémathèque québécoise, alors même que Pop Cycle y sera présenté. Durant cinq semaines, il réalisera un travail de recherche et de création lié à son doctorat pour compléter un film de Raoul Barré, en chantier au moment de son décès dans les années 1930. Pionnier du cinéma d'animation, l'artiste québécois a travaillé dans les studios où a été créé Félix le Chat, à New York, dans les années 1920.
Dans le film auquel il manque des morceaux, les séquences animées interagissaient avec des personnages en prises de vues réelles. Sans trop en dévoiler, John Harbour parle d'un style visuel «très cartoonesque et humoristique». Une histoire à finir… et à suivre.