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Au Québec, les femmes souffrant d'un problème cardiaque nommé sténose aortique seraient sous-traitées comparativement aux hommes. En effet, même si la prévalence de ce problème est quasiment similaire pour les deux sexes, les hommes sont plus nombreux que les femmes à profiter d'un remplacement de la valve défectueuse, révèle une étude publiée dans la revue Heart par une équipe de l'Université Laval.
La sténose aortique, aussi appelée rétrécissement de la valve aortique, provoque une diminution du diamètre de sortie du ventricule gauche, ce qui oblige le cœur à travailler plus fort pour éjecter le sang. «Si aucune intervention n'est pratiquée, le taux de mortalité est de 25% à 50% dans l'année qui suit l'apparition des symptômes liés à la maladie», précise Marie-Annick Clavel, professeure à la Faculté de médecine, chercheuse au Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la santé valvulaire cardiaque des femmes.
Au Québec, environ 60 000 personnes vivent avec une sténose aortique diagnostiquée lors d'une hospitalisation. Du nombre, 49% sont des femmes. «La prévalence de ce problème cardiaque a augmenté de 12% dans la population québécoise entre 2006 et 2018, précise la professeure Clavel. Elle augmentera d'autant au cours des dix prochaines années, principalement en raison du vieillissement de la population.»
Entre 2006 et 2018, le nombre d'interventions visant le remplacement de la valve aortique a doublé, passant d'environ 650 à près de 1300. Le pourcentage d'hommes opérés est passé de 11,7% à 14,5%, mais il est demeuré stable chez les femmes, tout juste au-dessus de la barre du 10%. Et ce, même si l'intervention a une efficacité comparable chez les deux sexes, précise la chercheuse.
Pourquoi opère-t-on moins les femmes que les hommes? «Lorsque l'échographie du cœur est concluante, soit dans près de 60% à 70% des cas, les femmes reçoivent les mêmes traitements que les hommes, souligne la professeure Clavel. Toutefois, nos recherches ont montré que, lorsque les paramètres d'une échographie ne vont pas dans le même sens, les médecins ont davantage tendance à conclure que la maladie est moins sévère lorsque le patient est une femme. Il y a encore cette croyance que la sténose aortique est une maladie qui frappe surtout les hommes.»
— Marie-Annick Clavel, au sujet du sous-traitement des femmes atteintes de sténose aortique
Pour corriger le déséquilibre femme-homme dans le traitement de la sténose aortique, la chercheuse estime que tous les patients ayant eu une échographie non concluante devraient faire l'objet d'un examen par tomographie axiale. «Cette technique d'imagerie médicale permet de mesurer un paramètre clé de la sévérité de la maladie, la calcification de la valve aortique. Il faut alors tenir compte du fait que, pour une sévérité égale de sténose, le seuil de calcification est plus bas chez les femmes. Cela devrait aider à résoudre le problème de sous-traitement de la sténose aortique chez les femmes au Québec.»
Les signataires de l'étude parue dans Heart sont Philipp Frieden, Claudia Blais, Denis Hamel, Philippe Gamache, Philippe Pibarot et Marie-Annick Clavel.