Depuis deux ans, les théâtres naviguent entre confinements et déconfinements successifs, une situation qui n'est pas sans effet sur la création. «Avec tous les projets qui sont reportés à cause de la pandémie, il y a un phénomène d'entonnoir ou de bouchon dans les programmations. Pour les artistes, le chemin semble plus long entre l'idée d'un nouveau projet et sa diffusion. C'est pourquoi il faut réfléchir à différentes activités entourant les programmations et à d'autres façons de rejoindre le public afin de continuer à mobiliser les artistes», soutient Samuel Corbeil.
Le comédien et metteur en scène est le nouveau coordonnateur artistique du Périscope. Ou plutôt cocoordonnateur, puisqu'il occupe ce poste avec sa collègue Gabrielle Ferron. Ensemble, ils sont responsables d'élaborer la programmation, créer des initiatives pour fidéliser la clientèle et toutes autres tâches connexes.
«Une cocoordination, c'est une première au Périscope, dit-il. En tant que diffuseur, l'institution a comme mission de donner la parole à tout plein de milieux. À deux, on double l'écoute et on multiplie les points de vue. Il y a aussi l'idée de parité qui est importante pour nous. On souhaite que le théâtre s'ouvre le plus possible à la communauté artistique, mais aussi à d'autres secteurs. On veut que les gens s'approprient le Périscope, s'y sentent chez eux et voient ce théâtre comme un lieu où il est possible d'imaginer plein de choses.»
On le devine, Samuel Corbeil n'est pas un novice dans le monde des arts de la scène. Après des études en interprétation au Conservatoire d'art dramatique de Québec, il a participé à des productions à Premier Acte, au Trident et à La Bordée, ainsi qu'à plusieurs événements comme Où tu vas quand tu dors en marchant?, Jamais Lu et le Mois de la poésie.
Avec le Collectif du Vestiaire, une compagnie qu'il a fondée, il compte cinq créations à son actif. Ses œuvres, résolument multidisciplinaires, font appel autant à la danse contemporaine qu'à la poésie, la vidéo ou la musique. «Dans ma pratique, je veux travailler avec des artistes qui ont d'autres démarches de la mienne. Quand différents langages se rencontrent, de nouvelles idées apparaissent. C'est quelque chose qui m'allume beaucoup de la création.»
D'artiste à étudiant
Si Samuel Corbeil aime tant le travail artistique, c'est parce qu'il lui permet d'explorer des sujets en périphérie de ses connaissances. C'est pourquoi il a obtenu en 2018 un MBA en gestion d'entreprise à l'Université Laval. «En terminant le Conservatoire en 2014, je n'étais pas outillé pour faire face au monde des affaires. Je me suis inscrit au MBA pour comprendre ce pan de la société. Les affaires, tout comme les arts, sont un langage. La création au Québec passe beaucoup par l'entrepreneuriat; pour rejoindre leur public, les jeunes n'ont pas le choix de former des compagnies ou de créer leurs propres occasions de jouer.»
Dans ses cours, Samuel Corbeil a développé un fort intérêt pour l'entrepreneuriat social, lui qui siège sur le conseil d'administration de la Corporation de développement économique communautaire de Québec. C'est pourquoi, MBA en poche, il s'est tourné vers un baccalauréat en sociologie.
«Je trouve important de prendre acte du contexte dans lequel la création se fait. Ce serait se fermer les yeux d'imaginer que ce contexte n'influence pas le produit fini. La sociologie permet de réfléchir aux conditions de travail des artistes et aux mécanismes de la création. Comme l'entrepreneuriat et le milieu des affaires, elle est imbriquée dans le monde artistique. Il est important et super intéressant de creuser ces questions», conclut l'étudiant.