Les éditions de l'Écume, c'est le nouveau bébé de la poète Laetitia Beaumel. Ce projet est né de deux constats: «À Québec, nous avons une scène poétique extrêmement riche, mais aucune maison de poésie dont le siège social est ici, dans la capitale. De plus, les auteurs, ceux sans qui le livre n'existerait pas, reçoivent seulement 10% des redevances. Une façon d'augmenter leur part de gâteau est de couper celle du distributeur. C'est ce que j'ai voulu offrir: payer les auteurs le double et m'occuper moi-même de la distribution», explique-t-elle.
Concrètement, la distribution est assurée par un réseau de cyclistes bénévoles, qui desservent les librairies en échange d'un exemplaire. La possibilité de mettre à contribution des voiliers pour faire la distribution outre-mer est aussi envisagée. Toujours avec l'objectif de réduire l'empreinte écologique de la maison d'édition, les livres sont imprimés sur du papier recyclé avec de l'encre végétale.
Autres particularités: les illustrations sont signées par des artistes qui se sont inspirés du livre et les auteurs sont impliqués dans toutes les étapes de production du recueil. «Il est hors de question d'imposer aux auteurs une page couverture. Ils sont inclus dans le choix du papier, du titre et dans toutes les décisions. L'auteur n'est pas qu'un détail dans le parcours du livre.»
Ce projet, sur lequel elle travaille depuis quelques années, découle en quelque sorte de ses recherches doctorales à l'Université Laval. Laetitia Beaumel termine une thèse multidisciplinaire en littérature, musique et agriculture. En gros, elle s'intéresse au phénomène agriculturel, qui consiste à rapprocher le milieu culturel et celui de l'agriculture. «Le développement durable et l'aspect communautaire sont au cœur de mes projets, dit-elle. Dans le cadre de mes études, j'ai fait beaucoup de travail en concertation avec des collectifs, ce qui rejoint la philosophie de la maison d'édition.»
L'éditrice n'est pas peu fière de présenter son premier recueil, Déjà le fruit. Cette œuvre d'Anne-Julie Royer pose un regard un brin mélancolique sur le thème du temps. «Ce recueil porte sur des obsessions que j'ai eues dans ma vie, précise l'auteure. Depuis que je suis petite, j'ai un rapport problématique au temps, aux choses qui passent, à la mort. Ce recueil est donc une démarche d'apprivoisement pour moi. Il m'a permis de répondre à des questions intérieures.»
Enseignante en littérature au Cégep Limoilou, Anne-Julie Royer est diplômée du programme de création littéraire à l'Université Laval. Pour elle, cette première publication est un rêve de longue date qui se concrétise. «Sur ma liste de choses à réaliser à tout prix, il y avait mes enfants et un recueil de poésie. C'est un projet qui m'habite depuis longtemps. Plus je vieillis, plus j'avais peur de ne pas être reçue par le milieu littéraire. Dans mon écriture, j'emprunte un style qui n'est pas forcément à la mode.»
Voilà qui a plu à Laetita Beaumel: une approche très personnelle de la poésie, qui fait fi des tendances. «La parole d'Anne-Julie est vraie. Une telle authenticité est rare. Elle ne cherche pas à choquer; elle offre une lenteur, une profondeur, une vérité. Cette forme très dépouillée, épurée et verticale, je n'avais jamais vu ça. J'ai trouvé son style à la fois original et très simple.»
En septembre, les éditions de l'Écume publieront deux nouveaux titres: une œuvre du collectif Les Bourrasques et une autre de Normand Génois. Par la suite, on prévoit sortir un recueil chaque changement de saison, donc quatre par année.
Outre Laetita Beaumel à la direction générale et littéraire, la maison d'édition réunit Shana Paquette, adjointe à la direction éditoriale et étudiante au certificat en révision professionnelle, et Nana Quinn, assistante à la direction littéraire.