«Je t’aime Madame Marie-Hélène et je m’ennuie de toi et aussi des amis de la classe.»
Ces mots, ce sont ceux de Lili, 6 ans. Pendant le confinement, elle a écrit à son enseignante de maternelle, car elle lui manquait beaucoup.
Le 11 mai dernier, elle était de retour avec la plupart de ses compagnes et compagnons de classe, tout comme des milliers d’écoliers du Québec.
Madame Marie-Hélène est une diplômée de l’Université Laval. Elle enseigne à la maternelle depuis 25 ans. «Toute petite, j’adorais ma professeure de maternelle, Madame Jocelyne, qui m’a beaucoup marquée, entre autres, parce qu’on faisait de la peinture et qu'on jouait au “coin maison”, dit-elle en souriant. Puis, de fil en aiguille, la vie a fait en sorte que je suis devenue une enseignante de maternelle.»
— Livia, 6 ans
Le fameux retour. Marquages multiples au sol, lavages des mains répétés, distanciation sociale et des petits bureaux… Tout compte fait, tout ça avait l’air de tout sauf d’une classe de maternelle. Car après tout, la première année d’école dans la vie d’un enfant se traduit par beaucoup d’apprentissages, mais aussi par beaucoup de jeux et de plaisir.
«Je suis vraiment impressionnée par les enfants, affirme l’enseignante. Je pensais qu’ils allaient être tristes ou inquiets, mais ils sont tellement heureux d’être en classe, de se voir. Par exemple, lors des périodes de jeux libres, les élèves peuvent habituellement aller jouer à des jeux en se promenant un peu partout dans la classe. Mais là, ils ont chacun un petit bac avec des jeux et des livres et ils doivent jouer à leur place. Mais ils ne s’ennuient pas! Ils ont du plaisir, ils se parlent beaucoup entre eux et même s’ils sont à deux mètres chacun. »
La seule difficulté qu’ils ont eue jusqu’ici? Appliquer la règle du deux mètres lors de la récréation à l’extérieur. À un élève qui lui a dit: «Oui, mais moi, Madame Marie-Hélène, je ne sais pas c’est quoi deux mètres!» Celle-ci lui a répondu: «Imaginez la grandeur du directeur de l’école, Monsieur Louis-Philippe, et placez-la entre vous et un ami». Et à ce qu’on dit, le truc de Madame Marie-Hélène a été bien saisi par tous ses élèves.
La maman de David, l’un des élèves de Madame Marie-Hélène, est assistante de recherche au CERVO, un centre de recherche affilié à l’Université Laval. En ces temps de pandémie, Marina Snapyan se dit impressionnée par la passion, la force et la résilience des enseignants.
«Pour moi, ce sont des véritables héros. Pas seulement parce qu’ils s’exposent au risque et qu’ils ont dû s’adapter aux mesures et à cette situation sans précédent dans de très courts délais, mais aussi parce qu'ils doivent apprendre à de très jeunes élèves à suivre de nouvelles règles auxquelles ils n'ont jamais été préparés ou entraînés auparavant. Et tout ça, en gardant un sourire rassurant pour les enfants et les parents, tout en mettant de côté leurs propres angoisses et incertitudes. Je dis alors un très grand merci à Madame Marie-Hélène, qui est pour moi une personne exceptionnelle».
Qu'est-ce qui aurait pu manquer aux enfants pendant le confinement? «Je dirais “les petits monstres des émotions”, qui sont inspirés du livre d'Anna Llenas, indique Madame Marie-Hélène. En maternelle, on parle beaucoup des émotions. Avant le confinement, quand ils vivaient des émotions en classe, ils avaient le droit d’aller coller un des six petits monstres en peluche de leur choix qui se nomment Colère, Amour, Sérénité, Peur, Joie ou Tristesse. Nos petits monstres étant maintenant rangés pour des raisons sanitaires, j'encourage donc les jeunes à ne pas hésiter à s'exprimer.»
Et quel serait le plus grand défi de Madame Marie-Hélène? «Le deux mètres aussi! Il faut constamment y penser, en plus d’enseigner, souligne-t-elle. Mais c'est surtout le fait que ce n’est pas dans notre nature d’être loin de nos élèves. La proximité en maternelle, ça fait partie de notre travail. Et n’oublions pas qu’ils ont seulement 5 et 6 ans. Mais bon, à voir la bonne humeur des enfants, c’est contagieux et ça me donne une énergie incroyable pour foncer et aller tout simplement de l’avant avec eux!»
En savoir plus sur le livre La couleur des émotions d'Anna Llenas