Comment les danseurs vivent-ils l’étape de la retraite? Cette question est au cœur du spectacle De la glorieuse fragilité, qui sera présenté au complexe Méduse, du 30 octobre au 1er novembre. Il s’agit d’une création de Karine Ledoyen, directrice de la compagnie Danse K par K et étudiante à la maîtrise en littérature et arts de la scène et de l’écran.
Inspirée par l’approche de docu-théâtre de son ami et collaborateur Alexandre Fecteau, la chorégraphe a interviewé une vingtaine de danseurs professionnels qui ont tourné le dos à la scène pour diverses raisons. Leurs récits, très touchants, ont servi de point de départ à la création de la pièce. «Ce qui m’intéressait dans ce projet, c’est la fragilité. Pour moi, le fait de quitter la danse est un moment de deuil. Ce qui ressort des entrevues, c’est une parole super belle qui peut résonner dans toutes sortes de sphères de nos vies où l’on est confronté à de petits ou de grands deuils», explique Karine Ledoyen.
Durant le spectacle, des extraits de ces entrevues seront diffusés. Témoignages, confidences et souvenirs du passé feront écho à la performance in situ de quatre danseurs, Elinor Fueter, Jason Martin, Simon Renaud et Ariane Voineau. Il y aura également projection de vidéos manipulées en direct par Andrée-Anne Giguère, doctorante en littérature et arts de la scène et de l’écran. «La cohabitation entre le discours du passé et la présence des danseurs sur scène crée une dichotomie pour ces interprètes qui sont en train de vivre les sensations dont se souviennent ceux qui ont quitté la scène. Malgré l’approche documentaire, la pièce n’est pas un documentaire. La poésie prend le dessus sur la création. Je me suis nourri des entrevues pour concevoir la chorégraphie avec les danseurs», poursuit Karine Ledoyen.
Sa démarche n’est pas celle d’une chorégraphe qui veut atteindre la perfection à tout prix dans les mouvements. Au contraire, elle laisse à ses danseurs de l’espace pour l’erreur. «Pendant la pièce, les interprètes se trouvent dans des positions difficiles où ils peuvent parfois perdre l’équilibre. S’ils tombent, s’ils ratent leur mouvement ou s’ils ne sont pas satisfaits de leur performance, nous avons convenu qu’ils peuvent arrêter à tout moment et recommencer. Ce procédé génère une complicité avec le public, qui aura l’impression d’assister à une répétition en coulisse du spectacle. Ainsi, il ressentira de l’empathie par rapport aux difficultés que peuvent vivre les danseurs sur scène», espère la chorégraphe.
Thème récurrent dans son œuvre, la fragilité fait aussi l’objet de ses recherches à l’Université Laval. «C’est quelque chose qui traverse l’ensemble de mon travail depuis le début, mais que je n’étais jamais parvenue à nommer. Avec ma maîtrise, j’ai pu définir le concept de fragilité et l’orienter autour d’un discours. Ce que j’apprécie, c’est ce moment où le danseur se dépasse et se surprend lui-même. Mon but est de trouver des stratégies pour rendre ce moment visible au public», dit celle à qui on doit plusieurs spectacles, dont Danse de nuit, Cibler, Air et La Nobody.
De la glorieuse fragilité marque une étape charnière pour Danse K par K, qui soufflera bientôt 15 bougies. Le spectacle sera présenté les 30, 31 octobre et 1er novembre, à 20h. Une discussion avec les artistes aura lieu après la représentation du 31 octobre. Un recueil produit d’après les entretiens menés par Karine Ledoyen avec les danseurs sera également disponible sur place.
Plus d’information sur Facebook ou sur le site de La Rotonde, qui a programmé le spectacle.