
Après une chirurgie buccale, les aliments liquides ou semi liquides sont recommandés pour éviter de blesser les tissus de la zone opérée et pour limiter la douleur au moment des repas. Les chercheurs ont découvert que certains de ces aliments pourraient apporter des bienfaits insoupçonnés sur le plan de la régénération des tissus buccaux.
Mahmoud Rouabhia, Dounia Rouabhia, Hyun Jin Park et Luc Giasson, de la Faculté de médecine dentaire et du Groupe de recherche en écologie buccale, et Ze Zhang, de la Faculté de médecine, arrivent à ce constat après avoir réalisé l’expérience suivante. Pour simuler ce qui survient lors d’un repas après une chirurgie buccale, ils ont exposé pendant 10 minutes des cellules épithéliales de gencive cultivées in vitro à trois aliments liquides: du jus d’orange, du yogourt à boire ou un substitut de repas liquide. «Nous avons retenu ces trois aliments parce qu’ils figurent dans le guide d’alimentation postopératoire en chirurgie buccale et maxillofaciale», précise le responsable de l’étude, Mahmoud Rouabhia.
Après 24 heures d’incubation à la température du corps humain, les cellules épithéliales exposées aux aliments liquides produisent davantage de kératine 5, 14 et 19 que celles des cultures témoins. «En général, ces protéines sont produites par des cellules jeunes, en bon état, qui sont en phase de prolifération», précise Mahmoud Rouabhia. Les cellules exposées synthétisent également plus d’interleukine 6, ce qui suggère qu’un processus inflammatoire lié à la régénération des tissus a été enclenché. Elles produisent aussi plus de ß-défensine 2, une molécule antimicrobienne, ce qui porte à croire que les fonctions immunitaires de ces cellules ont été stimulées. «Il s’agit d’une réaction souhaitable étant donné que la cavité buccale contient des centaines d’espèces microbiennes et que les cellules épithéliales sont la première ligne de défense de l’organisme.»
Pour compléter leur étude, les chercheurs ont provoqué une déchirure dans une couche d’épithélium gingival et ils ont observé ce qui survenait dans les 48 heures suivantes. Résultat? Les cultures exposées à un aliment liquide produisent davantage de filaments d’actine, ce qui suggère une plus forte migration cellulaire favorisant la fermeture de la plaie.
Chaque aliment testé avait ses forces, mais les différences n’étaient pas très marquées, souligne le professeur Rouabhia. «Je ne peux pas dire qu’un aliment est préférable aux deux autres. Par ailleurs, il est possible que d’autres aliments produisent des effets encore plus intéressants sur la régénération de l’épithélium buccal, mais il fallait bien commencer quelque part. Nous voulons maintenant déterminer quelles composantes de ces aliments sont responsables des effets observés pour aider les cliniciens à faire les meilleures recommandations possible à leurs patients.»