
L'enquête a été réalisée auprès d'une vingtaine de préposés aux appels d'urgence. Les entretiens se sont déroulés en 2010 dans cinq régions du Québec.
C'est l'un des aspects des stratégies mises de l'avant par ces travailleurs qu'a mis en lumière une équipe de chercheurs dirigée par Louise Saint-Arnaud, professeure à la Faculté de sciences de l'éducation et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l'intégration professionnelle et l'environnement psychosocial de travail. L'enquête a été réalisée auprès d'une vingtaine de préposés aux appels d'urgence. Les entretiens se sont déroulés en 2010 dans cinq régions du Québec. «Ce qui a été montré, c'est l'effort constant pour que le travail soit fait dans les règles de l'art, et ce, en dépit des contraintes, des risques et du danger», explique Louise St-Arnaud.
Autre moyen agissant comme une barrière de protection: faire le récit des appels aux collègues de travail. En plus de développer les réflexes nécessaires à la prise de décision rapide, le récit permet de revivre, de refaire l'histoire, de reconstruire les situations d'urgence ou leur traitement. Par le récit fait aux collègues qui ont, la plupart du temps, vécu les mêmes expériences, l'appel est «épluché», jusqu'à ce que la crainte ou la tension d'avoir plus ou moins bien fait son travail s'estompe et disparaisse.
«Pour que le récit opère, il faut que la confiance entre le collègue qui raconte et celui qui écoute soit totale, souligne Louise Saint-Arnaud. C'est une raison qui fait que le récit n'est pas accessible aux “profanes” et que, très vite, le préposé s'aperçoit qu'il ne parle de son travail qu'avec ses collègues préposés, ceux qui peuvent le comprendre.» Sur la base de la confiance, on s'expose volontairement au jugement des pairs, qui, en retour, vont commenter, rectifier ou soutenir la pratique telle qu'elle leur est racontée.
Enfin, l'humour est très présent dans le travail des préposés, révèle l'étude. Il libère, réconforte et allège le climat. Gros mots, sous-entendus et non-dits servent à évacuer la tension, sans autre forme d'explication. Les autres se gardent bien de juger parce qu'ils savent par expérience qu'on peut plaisanter d'un sujet grave tout en gardant le cap sur l'acte d'aider.