
Les jeunes auteures Miléna Babin, Sara Lazzaroni et Cassie Bérard.
— Marc Robitaille
Patchouli (Leméac) – Sara Lazzaroni
«Maman est morte. Je n'ai plus de père, plus d'amis, pas d'amant, pas d'enfants, pas de chien. J'ai vingt-quatre ans. C'est tout ce que j'ai.» Voilà le dur constat que fait Patchouli, l'héroïne de ce tout petit roman. Née de l'union d'une mère et d'un père beatnik et trimballée jusqu'à ses 12 ans sur les routes de l'Ohio, la jeune femme, de retour d'une longue bohème de 5 ans sur les routes du monde en solitaire, revient à Québec où sa mère se meurt du cancer. Désorientée, elle cherche à s'enraciner. C'est en se dénichant un emploi au Dolce Chiara, un restaurant tenu par un sympathique couple italien et autour duquel gravite une faune colorée, qu'elle trouve sa famille d'adoption. En apprenant l'italien, en s'abreuvant à la culture cinématographique de ce pays et en s'attachant à ses nouveaux colocs, elle parviendra à un certain équilibre dans un monde en perte de valeurs.
Les phrases courtes et l'écriture sans fioriture, bien que lyrique, de Sara Lazzaroni, servent ce récit qui carbure à la nostalgie. Si Patchouli emprunte quelques traits à sa créatrice, il n'en reste pas moins que la jeune écrivaine semble beaucoup plus déterminée que son héroïne. «Je me suis lancée dans Patchouli à 17 ans, confie l'étudiante au baccalauréat en anthropologie qui en compte 20 aujourd'hui. «J'ai entamé toutes sortes de projets d'écriture en parallèle, mais il y avait toujours le désir d'achever celui-là.» Disant écrire de façon très intuitive, elle compte bien s'adonner à cette activité toute sa vie et raconte avoir déjà envoyé un autre manuscrit à son éditrice. Ce qui l'inspire? «J'aime ce qui sort de l'ordinaire: le trash, l'hétéroclite, les auteurs qui savent exprimer des choses parfaitement ordinaires d'une façon nouvelle et surprenante!». L'auteur-compositeur-interprète Jean Leloup en est, à ses yeux, le parfait exemple.
Les fantômes fument en cachette (XYZ) – Miléna Babin
C'est un autre récit de jeune femme vivant à Québec que nous sert ici Miléna Babin. Également en manque de repères, Maeve vit sous l'emprise d'un amour fusionnel d'adolescence qui ne semble pas vouloir mourir. La jeune femme forme, avec Loïc et Fred, un trio aux liens ambigus et distendus étant donné que Fred parcourt le monde et que Loïc partage sa vie avec une autre femme. Une rencontre avec Max, un guitariste, laisse entrevoir que Maeve pourrait bien se détacher de ses fantômes et ainsi accéder à l'âge adulte, comme le souhaite Murielle, la vieille octogénaire qui vit au-dessus d'elle et qui ne manque pas de la sermonner: «Vous n'avez pas trente-six mille vies à vivre, ma chère. Et vous n'êtes pas éternelle non plus.» Il est question, dans ce livre très jeune de facture, de musique, de sexe, d'un petit peu d'amour et… de cigarette.
Cette histoire, et surtout les personnages, habite Miléna Babin depuis 10 ans. «Je me sentais littéralement hantée par eux; c'est d'ailleurs là que l'idée des fantômes m'est venue», raconte l'étudiante au baccalauréat en langue française et rédaction qui a profité de ses années d'Université pour rédiger son premier manuscrit. C'est sous le parrainage littéraire de Stéphane Dompierre, un écrivain qu'elle admire, qu'elle a mené ce projet d'écriture à terme. Chef de pupitre de la section arts du journal Impact Campus, la jeune auteure dit souhaiter poursuivre sur sa lancée, mais affirme que, dans un monde idéal, elle pratiquerait à la fois le métier d'écrivain, de blogueur, de chroniqueur et de journaliste. «J'ai besoin de me prononcer sur des sujets bien réels», confie-t-elle.
Miléna Babin sera au Salon du livre de Québec pour des séances de signatures le jeudi 10 avril de 17h30 à 19h, le vendredi 11 avril de 12h à 13h, le samedi 12 avril de 12h à 13h et le dimanche 13 avril de 15h à 16h au stand des éditions XYZ.
D'autres fantômes (Druide) – Cassie Bérard
S'il est aussi question de fantômes dans ce livre, nous sommes loin de l'univers de Miléna Babin. Cassie Bérard, doctorante en études littéraires et chargée de cours en création littéraire, s'est plutôt glissée dans la peau d'un père de famille, Albert, dont la vie bascule après qu'il ait vu une femme se suicider dans le métro de Paris, place Trocadéro. Obnubilé par cette morte, il délaisse compagne, enfants et boulot pour se mettre en quête de son identité. De fausses pistes en fausses pistes, il en vient à douter de tout. Tandis qu'il tente de faire la lumière sur le passé de la morte, sa propre enfance lui revient, dominée par la figure d'un père colérique et trop rarement éclairée par la présence d'une soeur partie trop vite et d'un grand-père affectueux qui lui répétait «qu'on ne meurt jamais par manque de merveilles, mais uniquement par manque d'émerveillement».
Ce roman complexe, tout en méandres, dominé par le monologue intérieur d'un personnage en quête de vérité, a été maintes fois remanié par son auteure et a exigé trois ans de réécriture. Cassie Bérard s'est notamment inspirée de Romain Gary, pour le mythe du double, et de Michel Butor, dont le personnage principal, dans le roman L'emploi du temps, se perd dans la ville qui l'accueille ainsi que dans ses souvenirs. «Comme je ne suis pas partie de moi pour créer cet univers, cet univers est devenu une partie de moi, estime-t-elle. Placer cette quête dans un lieu où je ne vis pas et la confier à un homme que je ne suis pas donnait à mon imagination toutes les libertés, et à mes personnages, une portée universelle.» L'écriture de ce premier roman a permis à la doctorante de prendre conscience des pouvoirs esthétiques de l'écriture et de la complexité de la fiction. Elle souhaite, pour la suite des choses, forger une oeuvre à la hauteur de ses aspirations littéraires.
Cassie Bérard sera présente au Salon du livre pour des séances de dédicaces le vendredi 11 avril de 18h30 à 19h30, le samedi 12 avril de 17h à 18h, et le dimanche 13 avril de 15h à 16h au stand des éditions Druide.
Salon international du livre de Québec
Voici une liste non exhaustive des membres de la communauté universitaire qui participeront à cette grande fête du livre qui débute aujourd'hui jeudi pour se poursuivre jusqu'au dimanche 13 avril au Centre des congrès de Québec.
Jeudi 10 avril
- À 16h, Sylvie Nicolas (Les variations Burroughs), doctorante en études littéraires, participera à une rencontre d'auteurs à l'Espace Tandem.
- À 16h, Miléna Babin (Les fantômes fument en cachette) participera à une rencontre d'auteurs à l'Espace jeunesse Desjardins.
Vendredi 11 avril
- À 18h, Gérard Duhaime (Sorray, le retour au monde), professeur au Département de sociologie, participera à une rencontre d'auteurs à l'Espace Tandem.
- À 18h, Annie Cloutier (Aimer, materner et jubiler), doctorante en sociologie, sera une des invitées de la table ronde «La mère dans tous ses états: écrire sa joie et son désarroi» à la Grande Scène Archambault.
Samedi 12 avril
- À 15h, Jocelyn Létourneau (Je me souviens?), professeur au Département des sciences historiques, donnera son point de vue lors de la table ronde «Avoir 20 ans au Québec: on se raconte quelle histoire?» à la Grande Scène Archambault.
Dimanche 13 avril
- À 12h, Louis Balthazar (Nouveau bilan du nationalisme au Québec), professeur retraité du Département de science politique, participera à une rencontre d'auteurs qui se tiendra à la Grande Scène Archambault.
- À 12h30, Serge Payette (Flore nordique du Québec et du Labrador), professeur au Département de biologie, et Henri Dorion (De Trois-Rivières à Percé. Des noms entre évidence et apparence), chargé de cours au Département de géographie, participeront à une rencontre d'auteurs à l'Espace Tandem.
- À 13h30, Sophie Létourneau (L'été 95), professeure au Département des littératures, participera à une rencontre d'auteurs à l'Espace Tandem.