
Le modèle de peau humaine du Laboratoire d'organogénèse expérimentale est formé de couches bien distinctes dans lesquelles on trouve des cellules (en rouge), du collagène (en bleu) et des vaisseaux sanguins. La masse circulaire au centre de l'image est formée de cellules cancéreuses.
— LOEX
Le directeur du LOEX en connaît un bout sur la culture cutanée puisqu'il étudie la question depuis bientôt 30 ans. À force d'essais et erreurs, son équipe est parvenue à reconstituer in vitro les différentes couches de la peau, puis à leur fournir les conditions gagnantes pour qu'elles s'organisent en un tout cohérent. Cette peau autoassemblée comprend un épiderme, une couche basale et un derme dans lequel on trouve des vaisseaux sanguins.
Pour produire leur modèle de peau cancéreuse, les chercheurs ont ajouté deux types de mélanomes – un qui produit des métastases et l'autre non – au milieu dans lequel l'épiderme est cultivé. «En conditions réelles, c'est dans cette couche que les mélanomes apparaissent, signale le professeur Auger. Par la suite, ils se développent de façon radiale avant de plonger vers le derme. Les mélanomes qui produisent des métastases peuvent alors migrer en empruntant la circulation sanguine. Les choses se passent de la même façon dans notre modèle de peau.»
Selon le chercheur, cette invention colle mieux à la réalité que les modèles animaux et les autres modèles de peau cultivée in vitro qui font tous appel, à divers degrés, à des biomatériaux. «La présence de vaisseaux sanguins et de couches cellulaires bien distinctes qui communiquent entre elles reproduit bien la morphologie et la physiologie de la peau humaine. Cela va permettre de pousser plus loin les études sur les mélanomes et sur leur traitement.»
Le mélanome est la forme la moins courante de cancer de la peau, mais il fait des ravages lorsqu'il produit des métastases. On lui attribue 75% de tous les décès causés par cette maladie, soit environ 10 000 victimes annuellement aux États-Unis et 10 fois moins au Canada. «Le nombre de cas est en hausse en dépit des campagnes de sensibilisation parce que les mélanomes qui apparaissent aujourd'hui résultent de l'accumulation de dommages à l'ADN de la peau qui ont commencé il y a des décennies», rappelle-t-il.
La méthode utilisée par les chercheurs du LOEX pour produire ce modèle de peau est décrite dans un récent numéro de la revue Clinical and Experimental Metastasis. L'article est signé par Laure Gibot, Todd Galbraith, Jacques Huot et François A. Auger.