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Moins de 20 ans après son implantation au Québec, le programme de vaccination contre le virus du papillome humain (VPH) est d'une telle efficacité que même les jeunes non vaccinés profitent d'une forme d'immunité. «Cela démontre que le programme fonctionne très bien et qu'il faut maintenir le cap», commente la professeure de la Faculté de médecine de l'Université Laval, Chantal Sauvageau, qui vient de publier, avec quatre collègues, une étude sur le sujet dans le Journal of Infectious Diseases.
Rappelons que le vaccin contre le VPH vise à prévenir les problèmes de santé causés par ce virus transmis sexuellement. Il existe plus de 200 génotypes du VPH, dont au moins 12 causent des cancers. Le VPH est d'ailleurs présent dans pratiquement tous les cas de cancer du col de l'utérus. Il cause aussi des condylomes génitaux ou anaux ainsi que des lésions pouvant conduire aux cancers de la gorge, du vagin, de la vulve, de l'anus et du pénis.
Au Québec, le programme de vaccination contre le VPH a été instauré en 2008. À l'origine, le vaccin était offert uniquement aux filles de 9 à 17 ans. Le vaccin couvrait alors les 4 types du virus qui posent les plus grands risques pour la santé. À partir de 2016, le programme québécois a été élargi pour inclure les garçons. Depuis septembre 2024, le vaccin, qui protège maintenant contre 9 types du virus, est offert aux jeunes de 9 à 20 ans.
«Au départ, nous voulions comparer l'efficacité de ces différents calendriers de vaccination, souligne la professeure Sauvageau, qui est aussi chercheuse au Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval et médecin-conseil à l'Institut national de santé publique du Québec. Normalement, on mesure cette efficacité en comparant la prévalence du virus chez des personnes vaccinées et chez des personnes non vaccinées. Cette approche est adéquate lorsqu'il n'y a pas d'immunité de groupe. Dans le cas du VPH, l'efficacité du vaccin combinée à la forte couverture vaccinale pour ceux qui ont reçu une dose ou plus – on parle de 90% des filles et de 86% des garçons lorsque mesuré à l'âge de 15 ans – suggérait qu'il était possible qu'une immunité de groupe se soit installée. C'est ce que nous avons voulu vérifier.»
Pour ce faire, l'équipe dirigée par la professeure Sauvageau a mesuré la prévalence du VPH chez 369 jeunes hommes de 16 à 20 ans non vaccinés contre le VPH et actifs sexuellement, recrutés entre septembre 2020 et août 2022. Résultat? Chez ces sujets, la prévalence des quatre types du VPH couverts par les premiers vaccins utilisés au Québec était de 0,5%.
Pour fins de comparaison, une étude québécoise menée chez des personnes de 18 à 24 avant l'implantation du programme de vaccination avait révélé que le VPH de type 16 était le plus prévalent dans ce groupe et qu'il avait été détecté chez 16% des hommes.
«La circulation des VPH est devenue si faible que même les personnes non vaccinées profitent d'une forme de protection attribuable à l'immunité de groupe», résume la professeure Sauvageau.
— Chantal Sauvageau
La présence de cette immunité de groupe implique toutefois que les autorités de santé publique vont devoir trouver une autre façon de suivre l'évolution de l'efficacité du programme de vaccination contre le VPH. «Le Québec est en voie de remplacer le test Pap qui sert au dépistage du cancer du col de l'utérus par un test de détection des VPH, souligne la professeure Sauvageau. Nous pourrions utiliser ce nouveau programme pour surveiller la prévalence des types de VPH les plus dommageables pour la santé. Si l'efficacité du vaccin devait diminuer, il serait possible de corriger le tir en réintroduisant une deuxième dose du vaccin.»
Les signataires de l'étude parue dans The Journal of Infectious Diseases sont Catherine Wolfe, Iulia Gabriela Ionescu, Marie-Hélène Mayrand, François Coutlée et Chantal Sauvageau.