
Gilles Kègle: «Chaque matin, j'ai rendez-vous avec l'amour».
— Marc Robitaille
«L’École de psychologie célèbre cette année ses 50 ans d’existence, explique Michel Pépin, le directeur de l’École. Pour souligner cet événement, nous souhaitions, entre autres, que l’Université décerne deux doctorats honorifiques, dont un à quelqu’un qui a accompli une œuvre en lien avec la psychologie dans un contexte social, humanitaire et communautaire. Gilles Kègle s’est imposé comme un excellent candidat.» Selon le directeur, la psychologie étudie notamment la problématique de l’isolement des personnes. L’École offre aussi un programme de psychologie communautaire. «Gilles Kègle, poursuit-il, joue un rôle important en intervention psychologique. Il a une action très reconnue comme aidant naturel vis-à-vis les laissés-pour-compte. Son apport est majeur quant à la diminution de l’isolement social des personnes démunies.»
Soigner, écouter, réconforter
Gilles Kègle naît à Trois-Rivières en 1942 dans une famille modeste. Cet homme simple, bon et humble a traversé des moments difficiles dans sa vie, des moments marqués par la solitude, les états dépressifs et la quête de sens. Une fois diplômé, convaincu qu’il peut aider son prochain, il s’installe à Québec dans le quartier Saint-Roch, l’un des plus défavorisés de la capitale.
Jour après jour, avec une détermination sans faille, il se mettra au service de toutes les personnes sans ressources placées sur sa route. Ces personnes démunies vivent des conditions difficiles liées notamment à la pauvreté, à la vieillesse, à la solitude, à la maladie chronique et à la dépression. Non seulement leur prodigue-t-il des soins infirmiers et d’hygiène corporelle ou encore fournit-il de l’aide ménagère, mais il leur apporte aussi, par sa présence, de l’écoute et du réconfort. En moyenne, Gilles Kègle effectue 35 visites par jour, que ce soit à pied, à bicyclette ou par autobus. Pour expliquer pareil dévouement, il a déjà déclaré: «Chaque matin, j’ai rendez-vous avec l’amour». En 2005, il décline l’invitation du gouvernement du Québec à assister, à Rome, aux obsèques du pape Jean-Paul II. Il ne veut pas s’éloigner de ses patients, ne serait-ce que pour quelques jours. Cet attachement se manifeste particulièrement l’été en période de canicule alors qu’il rend visite plusieurs fois par jour à ses patients les plus vulnérables.
Une équipe de bénévoles
En 1996, Gilles Kègle crée une fondation à son nom afin d’élargir son action communautaire. Cet organisme compte aujourd’hui plus de 70 bénévoles qui soutiennent l’œuvre de «l’infirmier de la rue». Ils aident les laissés-pour-compte à retrouver leur dignité, notamment en faisant la cuisine, en faisant l’entretien ménager et en s’occupant des animaux domestiques.
Pour son action sociale et communautaire, Gilles Kègle a reçu plusieurs prix et distinctions. En 1995, il est honoré par l’Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec. En 1999, il est décoré de l’Ordre du Canada. En 2001, l’Association des médecins psychiatres du Québec lui décerne le prix Humanisme. La même année, il est fait chevalier de l’Ordre de la Pléiade. L’été dernier, il reçoit la médaille d’honneur de la Ville de Québec. En 2005, les Éditions du Boréal ont publié, sous la plume d’Anne-Marie Mottet, Gilles Kègle, l’infirmier de la rue. En 2009, les Éditions GID publiaient, sous la signature d’Éric Côté, Gilles Kègle, le missionnaire de la paix.
L’Université décernera sa plus haute distinction à un homme exceptionnel, entièrement engagé dans l’action sociale et communautaire. Par son dévouement remarquable, son humanisme et son absence de préjugés, Gilles Kègle contribue quotidiennement au mieux-être de la société. Plus qu’un modèle, il représente l’espoir que l’on peut agir pour contrecarrer les problèmes psychosociaux liés à la pauvreté.