J’peux-tu t’aider?
Partis du nord-ouest de la France pour s’établir en Nouvelle-France au 16e siècle, nos ancêtres ont apporté leurs tournures de phrases et quantité de mots régionaux encore en usage aujourd’hui, qu’on regroupe parfois sous le vocable de vieux français. C’est le cas de «grafigner», «achaler», «trempe» (pour mouillé), «malin» (pour méchant), pour ne citer que ces exemples. Le français que nous parlons au Québec nous vient des régions et non de Paris, où la langue s’est peu à peu codifiée au 16e siècle. Il en a résulté une variété épurée du français qu’on a mise sur un piédestal, constate Claude Poirier, qui estime que la langue est beaucoup plus spontanée et expressive au Québec. «Les gens sont plus attachés à leur langue ici, c’est certain, souligne-t-il. Et puis, on n’a pas peur d’inventer des mots. Je pense à un ami français à qui je disais que j’étais nu-mains et qui a rétorqué que cette expression n’existait pas. “Mais on dit pourtant bien nu-pieds!” lui ai-je fait remarquer. C’est un exemple parmi tant d’autres qui illustre la vitalité du français québécois.»
Selon Claude Poirier, le français se porte bien au Québec. À ceux qui trouvent que nos jeunes écorchent la langue avec des «check» et des «full» à tout crin, sans compter l’emploi généralisé des «j’peux-tu», il répond que le français se porte beaucoup mieux dans nos cours d’école qu’il y a 50 ans. «L’évolution se fait peu à peu, affirme le linguiste. Nous ne parlons pas québécois, nous parlons français à la manière québécoise. Il faut comprendre d’où nous venons et pourquoi nous parlons ainsi. Peu à peu, j’ai confiance que le registre soigné de notre français va se dégager de notre identité.»