
En prendre et en laisser
Aux fins de son étude qui s’est déroulée en 2007, Marie-Ève Lang a demandé à 14 adolescentes franco-canadiennes âgées de 15 à 17 ans de lire trois numéros du magazine québécois Adorable (aujourd’hui publié sous un autre nom) et de noter leur indice d’intérêt. Des discussions de groupe et des entrevues individuelles complétaient la démarche. Premier résultat: la sexualité a la cote auprès des jeunes filles. En effet, les articles sur le sexe l’emportent haut la main sur d’autres sujets comme la décoration, l’actualité et la technologie. La mode et la beauté suivent de près. En second lieu, plus les participantes sont âgées, plus leur intérêt pour les textes à caractère sexuel augmente. Cet intérêt est également plus élevé lorsque les parents découragent la sexualité chez leurs jeunes. Invitées à s’exprimer sur leur type d’images préférées, les répondantes ont désigné celles symbolisant à leurs yeux l’amour véritable, comme cette photo montrant un couple élégamment habillé échangeant un baiser: on y voit un homme agenouillé offrant sa longue cuisse comme siège à la femme. «Ils semblent s’aimer vraiment et être fidèles l’un à l’autre», résume d’ailleurs l’une des adolescentes. Ce qui n’empêche pas le fait que la photo d’un bel homme torse nu attire leur attention et que les nouvelles érotiques les amusent.
Les jeunes filles affirment lire les textes sur la sexualité principalement pour apprendre et se tenir au courant des dernières tendances, en quelque sorte comme elles le font pour ceux traitant de mode et de beauté. Elles les lisent également pour le plaisir que cette lecture leur procure et pour se rassurer sur leur propre corps et sur certains aspects de la sexualité féminine, entre autres. Mais l’une des conclusions à laquelle en arrive Marie-Ève Lang dans son mémoire est que les jeunes filles ne gobent pas tout ce qui est écrit dans ces textes. «Elles savent qu’il faut en prendre et en laisser dans ces articles, explique l’étudiante. Elles trouvent même que certains journalistes vont trop loin dans les détails, qu’ils avancent des idées dégradantes pour les femmes. Je pense à un texte intitulé “Caresses 101” où l’image dégradante de la femme projetée dans ces textes a été reçue de façon très négative par les répondantes.»