Un coup de foudre
«J’ai toujours été fasciné par la richesse de la prose du 17e siècle, explique François Lavallée. Malheureusement, plus personne n’écrit en vers rimés aujourd’hui et je trouve ça dommage», insiste ce fervent admirateur de Molière, Racine et Boileau. Traducteur de métier, l’homme a écrit sa première fable en 1994 pour le compte d’un petit journal alors qu’il cherchait sous quel angle aborder un sujet qui avait fait beaucoup couler d’encre à l’époque, en l’occurrence un soldat sikh de la Légion royale canadienne désireux de conserver son turban dans l’exercice de ses fonctions. «Je tenais là les deux éléments importants d’une fable, dit François Lavallée, une image et une moralité. J’ai décidé de m’amuser à faire un pastiche de La Fontaine et j’ai eu le coup de foudre.» Si Jean de La Fontaine est son modèle, les sujets dont l’auteur traite dans son recueil sont en revanche bien contemporains. Dans «Le sac de plastique et le brin d’herbe» est abordé le problème de la qualité de l’environnement et du sentiment de fragilité devant la mort, mettant en vedette Maître Ziploc qui se targue de survivre pendant que tout trépasse autour de lui, du plus gros insecte à la plus petite graine. Dans «Le pédégé et le pollueur» et «L’allégorie de la piscine», c’est notamment le principe du «pas dans ma cour» si cher aux hommes et aux femmes de notre temps qui est mis en valeur. Le fabuliste parle également de terrorisme («Gros Jean dans la cour d’école»), de chirurgie esthétique («Paula qui voulait avoir l’air plus jeune») et de violence dans le sport («L’amateur de hockey»). En tout, 25 fables ciselées comme autant de petits bijoux qui nous réconcilient avec le genre, le tout assaisonné de beaucoup d’humour. Lisez «Le bilieux et l’urinoir à œil magique» qui aborde un sujet universel comme la médisance ou, dans un registre tout à fait différent, «Le cow-boy et le cheval vert», une fable écrite en joual. La Fontaine se retournerait-il dans sa tombe?
«Toute fable ayant sa moralité, comme le disait La Fontaine, certaines personnes peuvent être rebutées par cet aspect moralisateur, constate François Lavallée. Pourtant, quand on regarde le succès de livres de psychologie populaire ainsi que tous les petits textes moralisants qu’on reçoit tous les jours dans notre courrier électronique de la part de tant d’amis qui nous veulent du bien, force est de constater que les gens d’aujourd’hui ne dédaignent pas tant que ça les préceptes qui pourraient éclairer leur conduite.»