«En dépit de parcours professionnel et familial passablement différents, les premiers et les derniers baby-boomers présentent d’importantes similitudes», explique Charles Fleury qui, pour les fins de cette étude supervisée par Daniel Mercure, a scruté à la loupe diverses enquêtes menées par Statistique Canada depuis 1976. «Essentiellement, le portrait de la génération des premiers baby-boomers qui a été idéalisé et généralisé concerne les personnes scolarisées, affirme le chercheur. Ceux qui n’ont pas poursuivi de longues études ont souvent travaillé dans le secteur manufacturier. Beaucoup d’entreprises ont fermé leurs portes et ces baby-boomers de la première heure ont perdu leur emploi. Ceux-là n’auront certainement pas droit à une retraite dorée.» Pas mieux du côté de ceux qui font partie de la génération X: hors de l’obtention du diplôme d’études secondaires, il n’existe point de salut, leur lot étant la précarité d’emploi ou encore des emplois mal payés, où l’obligation de joindre les deux bouts à toutes les fins de mois ne permet même pas d’envisager une retraite exempte de soucis matériels.
La vieillesse sacrifiée
Par ailleurs, s’il est vrai de dire que la cohorte scolarisée de la génération X a connu des conditions d’insertion professionnelles plus difficiles que celle de la génération lyrique, ses membres ne se sont pas empêchés pour autant de faire des enfants. Ils ont tout simplement retardé l’âge d’en avoir. Loin d’être matérialistes à outrance quand elles finissent par occuper des emplois stables et bien rémunérés, les personnes issues de la génération X tendent même à valoriser davantage certains aspects reliés au monde du travail que leurs aînés de la génération lyrique, souligne Charles Fleury. Elles accordent ainsi une grande importance au climat de travail dans lequel elles évoluent, souhaitent un travail qui leur permette de se réaliser pleinement et qui n’occupe pas toute la place dans leur vie.
Ce qui n’empêche pas le fait que leur entrée tardive sur le marché du travail aura des conséquences sur leur avenir. «Au lieu de parler de génération sacrifiée, on devrait peut-être parler de vieillesse sacrifiée, constate Charles Fleury. Le vieillissement de la population fera en sorte que les membres de la génération X auront sans doute à travailler bien au-delà de 55 ans et même de 65 ans avant de pouvoir prendre leur retraite. Ils ne resteront pas au travail par choix mais par nécessité.»